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Chronique de fin de soirée: aux frontières de la friend zone

Il a été question de plusieurs filles au cours de mes différentes chroniques depuis le mois de septembre. Avec le recul, certaines relations sont plus faciles à classer que d’autres.
 
Je continue de rendre visite à Gen à la (Found)erie pour jaser de tout et de rien, @DJUBS est toujours ma +1 de prédilection pour n’importe quelle activité mondaine qui puisse exister sur l’île, Helen a cessé de m’envoyer des SnapChat après avoir emménagé avec son copain, j’entretiens toujours une tension (sexuelle) nébuleuse avec Jeanne d’Arc, je n’ai pas passé une minute de plus avec la fille que j’ai connue pendant huit heures suite à mon week-end de l’Action de Grâce, l’inconnue du Mile-Ex ne s’est jamais manifestée, mon ex ne me parle(ra) plus (jamais), je ne suis pas retourné aux danseuses nues.
 
Et puis il y a mon amie Brige…
 

 
Mon amie Brige.

Cela fera bientôt six ans jour pour jour que je connais Brigitte, bientôt six ans que nous sommes amis. De très bons amis. Toujours là l’un pour l’autre, toujours là pour se saouler à l’alcool fort, et ce, peu importe où, de Montréal à Toronto. De vrais amis.
 
Et samedi ne devait pas être différent.
 
En visite à Montréal, sans chambre d’hôtel, elle passe le week-end chez moi. Rien d’inhabituel. Or, elle me lance un défi à Street Fighter II sur mon SNES, et elle me bat avec Chun Li. Très inhabituel.
 
Normalement, cette défaite anodine n’aurait dû affecter que mon orgueil de gamer, mais elle déclenche plutôt une émotion coup de poing que je ne serai pas en mesure de chasser de la soirée: Brige m’impressionne. Tout semble pourtant normal lors de nos parties de billard à la Brasserie Laurier. Nous rions, complices, comme nous en avons l’habitude. À l’exception que ce soir, tous ses déhanchements près de la table me donnent envie de me rapprocher d’elle. De la tenir par sa fine taille de yoga.
 
Lorsque nous poursuivons notre soirée au Datcha, l’obscurité n’aide en rien ma situation. La lueur des chandelles sur les tables fait danser la lumière sur ses longs cheveux bruns. Je veux les dégager de son cou parfumé à la lavande. Après deux scotchs, je veux tout simplement mordiller son cou.
 
Nous quittons cette obscurité anonyme en direction de la pénombre rassurante du Baldwin. La possibilité d'y croiser quelqu'un que je connais et l'éclairage tamisé de l'endroit me décourageront certainement de faire, ou de dire, quelque chose de déplacé qui ne ferait qu'attiser davantage les sentiments qui m'envahissent depuis le début de cette foutue soirée. Or, c'est l’inverse qui se produit. Tous les deux noyés dans l’alcool, nous entreprenons de séduire en duo une barmaid aux fesses parfaitement mises en valeur dans un short de cuir taille haute. La sexualité plane au-dessus de ma tête telle une épée de Damoclès et menace de remettre en cause toute l’amitié que j’avais tenue pour acquise entre Brigitte et moi.
 
Après avoir titubé ensemble dans l’humidité froide d’une nuit montréalaise d'hiver, les bras entrelacés l’un dans l’autre (pour n’importe quelle autre raison que pour se réchauffer) nous arrivons chez moi où je sais que les lumières s’éteindront bientôt pour de bon, et pour la nuit.
 
L’obscurité est totale.
 
Couché avec Brige dans mon lit King, chacun de son côté respectif, je fixe le plafond tout en étant bercé par les paroles de la pièce Afraid of the Dark d’Ejecta qui résonnent sur une playlist Songza.
 

 
This one heart is afraid of the dark
Never gonna stop you, never gonna conquer
Fear is running heart, my fear is forever
Darkness is in everything.

 
Je ne serai plus jamais capable de voir Brige comme avant.
Je suis terrifié d’avoir planifié un voyage à Brooklyn avec elle durant les Fêtes.
J’ai peur de perdre une amie, une vraie.
J’ai peur d’aimer.

Même lorsque le soleil se lève dimanche matin, et que nous sommes toujours couchés sur les côtés respectifs de mon lit, j'ai la ferme conviction d'avoir outrepassé les frontières psychologiques de la friend zone.

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