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Benedict Cumberbatch livre une perfo renversante dans «The Imitation Game», un des favoris aux Golden Globes!
Crédit: Benedict Cumberbatch (à gauche) et Alan Turing (à droite) /Blackbear Pictures

Lorsqu’on évoque les héros de la Seconde Guerre Mondiale, on fait l’éloge d’hommes politiques, de commandants en chef ou de pilotes émérites. Mais un mathématicien prodige? Not so much. Pourtant, le Britannique Alan Turing, qu'on surnomme le père de l’informatique moderne, a carrément fait basculer la guerre en inventant une machine pouvant décrypter les communications secrètes de l’armée allemande. Mais pourquoi n'est-il pas mieux connu? Il ne serait pas déraisonnable d'avancer que son orientation sexuelle y est pour beaucoup, à une époque où la Grande-Bretagne pratiquait la castration chimique de gens coupables de ce «crime».

Gagnant du prix du public au Festival international du film de Toronto en septembre dernier et en lice pour cinq prix aux Golden Globes, The Imitation Game est un solide biopic de Morten Tyldum (Headhunters) qui se penche sur cet as de l'informatique. Le film met en lumière comment les services secrets britanniques (MI6) ont fait appel à Turing pour mener une équipe chargée de décoder Enigma, une machine de cryptage allemande réputée inviolable. The Imitation Game bascule dans le temps – de la jeunesse difficile de Turing à son énorme exploit de guerre jusqu'à sa fin de vie tragique –, afin de mieux comprendre celui que le magazine Time a nommé l’une des 100 personnalités marquantes du 20e siècle

 
Pour Benedict Cumberbatch, qui se plaît à incarner les plus illustres surdoués de l’empire britannique (Sherlock Holmes! Stephen Hawking! Julian Assange!), il était crucial que le film nous présente Turing de l'enfance jusqu'à la mort. «Au début du film, on peut voir Alan comme quelqu’un d’introverti et d’égoïste dans sa façon de travailler, remarque un Cumberbatch particulièrement émotif lorsqu’on le rencontre à Toronto pendant le TIFF, au terme d’une longue journée d’entrevues. Mais il ne souffrait pas d'autisme, ni du syndrome d’Asperger. C’était simplement une âme très sensible, qui bégayait terriblement, qu’on avait violenté très tôt et de façon épouvantable tout au long de sa vie.»
 
Le film réunit une distribution d’exception pour incarner ceux qui ont épaulé Turing – de Matthew Goode et Allen Leech à Keira Knightley –, mais c’est Cumberbatch qui porte The Imitation Game sur ses épaules, maîtrisant un débit, une gestuelle et une démarche saisissants. En fait, il est pratiquement impossible d’imaginer Leo DiCaprio le remplacer, lui qui avait à l’origine été pressenti pour le rôle. À l'écran autant qu'en entrevue, Cumberbatch défend avec fougue l’héritage de celui qui n’a jamais su se défendre de son vivant. Il se dit d’ailleurs horrifié par le traitement qu’a subi Turing, condamné à la castration chimique pour «actes indécents» en 1952, en pleine période de paranoïa maccarthyste. «Le fait que les gens qu’il a libérés du fascisme et de l’occupation nazie l’aient ensuite persécuté… Comme toute forme de haine, c’est l’ignorance qui l’alimente. On voit la chose se reproduire de nos jours avec le nationalisme russe et l’homophobie là-bas. Ou en Grèce, avec la montée du Golden Dawn et les hommes gais battus dans des squares publics d’Athènes. C’est terrifiant.»
Jack English/Blackbear Pictures 
 
The Imitation Game se veut un hommage aux libres-penseurs et à tous ceux qui, côute que coûte, osent agir différemment. À commencer par Turing, qui a eu l'audace d'écrire directement à Winston Churchill en temps de guerre pour défendre la légitimité de son projet de décryptage. Cumberbatch souligne d'ailleurs que la castration chimique n’a pas freiné les ardeurs de Turing, qui a continué à publier d’influents papiers scientifiques jusqu’à son suicide. «Même pendant cette torture, Turing a poursuivi son travail remarquable sur la morphogénèse. C’était un homme incroyablement tenace et généreux, qui ne s'est jamais apitoyé sur son sort. La vraie tragédie, c'est que la mort fut sa seule issue.»
 
The Imitation Game
En salles le 19 décembre

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