J’ai commencé à fréquenter le gym pour essayer de maintenir un semblant de fourrabilité. (Et accessoirement, être en forme.) On y rencontre des mecs qui lèvent des trucs pesants pour gonfler leurs bras et des filles qui grimpent des marches et des marches afin d’arriver un jour à l’étage des culs tight.
Je n’ai pas tellement le profil gagnant. Déjà j’y vais le matin avec la face fripée, le linge mou et les cheveux en dépression, mais en plus le fameux corps du pigiste qui passe sa journée devant l’ordi, ce n’est pas ce qu’il y a de plus populaire au royaume de la fonte.
T’as beau tomber amoureux de la jolie fille souple aux grands yeux de chat, quand tu finis à moitié mort à vêler comme un perdu avec la face écrapoue contre le tapis, tu ne séduis personne. Ton cœur à bout s’émiette en regardant partir ta fille parfaite, parfaitement indifférente à tous tes efforts de wuss. Il ne te reste qu’à essayer de te convaincre qu’elle devait être nounoune anyway.
De toute façon, l’amorce était presque impossible.
«Ouais, bébé, j’ai des longs bras minces pas très forts, mais sache que chaque semaine, j’écris une chronique de branleur dans le NIGHTLIFE.»
C’est sûr que ses culottes vont s’inonder d’une shot. D’ailleurs, on pourrait croire que les filles aux bras minces seraient attirées par les gars aux bras minces, mais ça ne semble pas fonctionner comme ça. Mais bon, je ne peux pas vérifier tout ça parce qu’il paraît que cruiser au gym, c’est mal.
Avec tous les gyms exclusifs aux femmes, le message est clair: fuck off! Elles ne veulent pas être abordées, elles ne veulent pas être regardées et elles trouvent que les gars puent. Il y a de quoi se sentir mal d’être un mâle avec un pénis et des instincts déviants. J’essaie donc d’adopter un comportement exemplaire et de laisser tout mon scrotum au vestiaire.
Je nettoie toutes les machines auxquelles je touche. Je garde une bonne distance avec le sexe opposé. Je ne jase à personne. Je ne mate personne… Directement. (J’ai la décence de le faire de façon parfaitement hypocrite via l'un des 400 000 miroirs.)
D’ailleurs, si c’est mal d’aborder une fille au gym, qu’est-ce qu’il reste comme endroit propice? L’épicerie? L’église? Facebook?
Pour un gars ordinaire qui essaie de faire la bonne affaire, les hublots d’opportunités se font rares. Est-ce que les bars ont vraiment l’exclusivité? La fameuse place sombre avec la musique trop forte? Super.
J’envie les filles qui peuvent aborder n’importe qui n’importe quand. On ne les imagine pas se faire revirer au gym.
Gars baraqué: «Eeeeh, ‘scuse-moi ma petite chérie luisante, tu vois pas que je suis occupé à lancer un ballon pesant contre le mur, là? Va sécréter ta phéromone ailleurs.»
Pourtant, il n’y a pas grand-chose de plus sexe qu’une salle de gym. Plein de monde à l’entrejambe moite qui soupire fort à chaque effort. Des filles habillées serrées qui démontrent constamment leur grande flexibilité. Des hommes cut au cardio inépuisable. Sans oublier que tous les entraîneurs sont clairement sado-maso.
Je comprends qu’on n’y est pas à notre meilleur et que ce n’est peut-être pas le moment où on se sent le plus attirant. C’est différent des bars où les gens sont parfaitement chromés, parfumés et habillés. Au gym, t’es à bout de souffle, à quatre pattes et tu dégoutes. Dans le fond, les bars et le gym, c’est un peu comme un avant/après. Avant le sexe. Après le sexe. Manque juste le mascara qui coule.