Le tout dernier restaurant du groupe A5 (Flyjin, Jatoba, Hà, Blumenthal, etc.) vient tout juste d’ouvrir sur le Plateau: le Kozu. Situé dans les anciens locaux du bar Rachel Rachel sur la rue du même nom, l’établissement se veut une petite brasserie asiatique, un concept que les propriétaires connaissent bien pour en avoir ouvert quelques-unes. Ce petit resto de 70 places est ni plus ni moins que le petit frère du Jatoba, piloté lui aussi par l’excellent chef Olivier Vigneault.
Mercredi soir, le restaurant était presque plein. Une foule bruyante et joyeuse s’animait autour des tables. La musique de type lounge était forte; il fallait hausser considérablement la voix pour se faire entendre. Mais cela ne semblait pas déranger la clientèle de l’endroit, qui semblait déjà y être habituée.
Le décor
Dès que je suis entrée dans le resto, mes yeux ont dû s’habituer à la baisse de lumière. L’endroit était un peu sombre, de grands rideaux noirs ouverts aux fenêtres laissaient entrer un peu de clarté extérieure. Quand le focus se fit au niveau de mes pupilles, je reconnus le style et le design particulier. Des banquettes en cuir noir, des céramiques à carreaux blanches sur les murs, des lignes droites et franches, du marbre, une cuisine ouverte et des plantes disposées ici et là pour colorer le décor d’une touche de vert… Tout cela me rappelait, en plus petit, le Kampaï Garden. Pas étonnant, puisque le design du restaurant a été confié à la même personne, Amlyne Philips, qui a réalisé aussi celui du Jatoba. L’utilisation de l’espace est encore une fois bien pensée et on aime le style à la fois minimaliste et fonctionnel de l’endroit. Faisant face à la cuisine ouverte, séparée par la salle à manger, se trouve le bar où plusieurs clients s’attablaient pour déguster des plats et siroter des cocktails. Des lampes suspendues, à l’éclairage subtil, donnent la dernière touche au côté feutré de l’endroit.
Le bar
Comme dans toute brasserie qui se respecte, le bar et la carte des cocktails doivent être pris au sérieux. Ici, on est entre bonnes mains. Expérience des propriétaires oblige. D’abord, le bar est joliment dessiné et on y prend place confortablement grâce à de hauts tabourets confortables. Ensuite, n’importe où vous vous situez dans le restaurant, vous avez une vue imprenable sur les multiples bartenders qui se font aller le « shaker » pour vous concocter de merveilleuses potions de bonheur.
Finalement, et surtout, on y trouve une carte de cocktails et de boissons alcoolisées qui est à la hauteur de nos attentes. Normal, car c’est le grand manitou des cocktails et mixologue officiel du groupe A5, Lawrence Picard, qui en signe la carte. Parmi les favoris du menu cocktail, notons l’incontournable Emperor Mule (une version différente du Moscow Mule, qui n’est pas servie dans une éternelle tasse de cuivre, mais plutôt dans un long verre transparent), avec son kick frais de gingembre et son côté acidulé-sucré qui sera parfait pour la saison chaude.
Bien aimé aussi le Calpico Gin Fizz, un genre de limonade glacée « pour les grands ». Ce dernier cocktail se prend bien avec la nourriture épicée en raison de son côté rafraîchissant et citronné.
Côté vins, la liste est intéressante mais les options bières ou sakés restent toujours les choix les plus sûrs pour accorder des plats aux saveurs multiples. Le choix est impressionnant dans les deux cas et il sera encore amélioré, apparemment, dans les prochaines semaines. Notons au passage, l’offre de plusieurs bières asiatiques à la bouteille (Kirrin, Ichiban, TsingTao, etc.) et de microbrasseries en fûts. Mais le plus impressionnant, c’est le choix de sakés : des importations privées et des produits d’exception offerts au verre, en format 300ml, 720ml et même… en magnum ! Le sommelier et directeur général, Maxim Laliberté (Maison Boulud), adore trouver de petites perles pour agrandir la sélection de sa carte et il n’a pas fini de nous étonner.
La nourriture
D’abord un petit mot sur la cuisine : sympathique lieu ouvert, où on voit la brigade organisée s’affairer. Une cuisine qui rappelle aussi un peu celle du Kampaï. Des tabourets font face à la cuisine, et on peut y prendre place si on veut être proche de l’action.
Ensuite le menu. Le concept de la carte est assez simple. On y retrouve quatre sections : la première « Dumplings / Riz », la deuxième « Salades / Légumes / Tofu », la troisième « Poissons », et la dernière et non la moindre, « Viandes ». On aura compris que les deux premières sections se composent surtout d’entrées ou de plats d’accompagnements, et les deux dernières, de plats principaux. Mais comme les plats sont à mi-chemin entre un format tapas et un plat principal, on peut en prendre deux ou trois d’une même section et se les partager pour pouvoir goûter à plusieurs plats.
Ce qui est intéressant, c’est que les prix sont vraiment très raisonnables : entre 3 et 14 dollars pour les deux premières sections et entre 14 et 30 dollars pour les plats de poissons et de viandes. Ce qui fait dire à Maxim Laliberté, le directeur général, que l’endroit est un peu une sorte de mini Jatoba : « Dans les deux restaurants, le chef Olivier Vigneault met de l’avant ses spécialités culinaires. On retrouve ici un menu un peu différent, mais également des items similaires du Jatoba, comme le plat de morue noire au four, un classique de la cuisine d’Olivier. Sauf qu’ici, les portions sont plus petites et les prix aussi, ce qui te permet de goûter à plusieurs plats ». Maxim ajoute que depuis son ouverture, le resto est plein non seulement en raison de sa nouveauté, mais aussi car il accueille le surplus de gens qui ne peuvent se trouver une place au premier resto. « Cela permet à la clientèle de découvrir ce nouvel endroit et d’y revenir ensuite, s’ils ont aimé », ajoute-t-il.
Cette soirée là, voici les plats que j’ai essayés (si vous vous inquiétez pour mon estomac, ne vous en faites pas, on était deux à se les partager). J’ai débuté avec les dumplings Gyosa (un de leur classique) au porc et aux crevettes, à la sauce soya Chiang Kiang et sambal. Comme autre entrée, j’ai choisi la « Kozu slaw », une salade de mangues, papaye verte, concombre, coriandre, oignon rouge, mix d’acajou, sauce soya aux agrumes et flocons de piments. Comme légumes d’accompagnement, les brocolettes vapeur (sorte de croisement entre un brocoli et un rapini) sauce kimchi à la mangue et les champignons Maitake grillés.
Comme plats de viandes/poissons, j’ai demandé qu’on m’apporte la morue noire rôtie au four (un must, je crois, à essayer), le tataki de bœuf et les rouleaux de canard confit.
La critique
Le menu est clairement d’inspiration asiatique, mais plus particulièrement d’appartenance chinoise, japonaise et vietnamienne. Le tout, servi avec quelques entourloupes moins asiatiques, comme l’utilisation de truffe, par exemple, dans le plat de tataki de bœuf.
Pour commencer, j’ai adoré les dumplings ! Faits à la main, l’enveloppe de pâte était toute délicate en bouche. Par contraste, l’intérieur à la viande de porc et crevettes était goûteux, viandu et bien gourmand. Un bon « starter », comme on dit ! La salade de mangue était bonne, rafraîchissante et savoureuse. Je pense que cela va vite devenir un classique en plat d’accompagnement ou en entrée.
Sont arrivés ensuite les plats de brocolettes vapeur, de shitakes grillés et de tataki de thon. Les brocolettes étaient délicieux, croquants à souhait et la petite vinaigrette qui les accompagnait était merveilleusement bonne, d’une belle acidité qui tranchait avec le légume. Pour ce qui est des shitakes, c’est peut-être le plat qui m’a le moins plu. Une forte saveur fumée les enveloppait, puisqu’ils ont été cuits sur le grill. Un goût un peu trop prononcé, si je compare à la finesse des autres plats. Le tataki de thon rouge saisi est incontestablement une des meilleures assiettes au menu. D’abord, il faut savoir que le thon utilisé est de qualité bluefin, donc de première qualité. Et c’est seulement le deuxième restaurant de Montréal qui en sert. Sauf qu’ici, on peut se le permettre, car les portions sont plus petites et le prix vient avec (28 $). Sa chair est tendre à souhait, son pourtour juste un peu grillé pour plus de saveur, et sa vinaigrette au soya et wasabi totalement approprié. Vous vous en délecterez !
Le plat de morue noire est aussi spectaculaire. Pour ceux qui ont dégusté ce plat au Jatoba, vous allez certainement aimer celui-ci aussi. La morue se défait à la fourchette, son petit goût sucré (marinade au chogo miso) lui va à ravir et les lotus marinés trois couleurs qui l’accompagnent sont de pures merveilles de condiments vinaigrés. Ce fut ensuite le tour du tataki de bœuf. Il était bon (la qualité du bœuf est exceptionnelle. Ce n’est pas du Wagu, mais quand même) sauf que les bébés pêches amères aromatisées à la truffe dans l’assiette goûtaient VRAIMENT la truffe ! Ce qui fait qu’à mon avis, cela débalançait un peu l’équilibre des saveurs et empêchait de goûter pleinement la viande.
Pour terminer, je me suis régalée avec les rouleaux de canard confit qui étaient encore meilleurs (et là, on a carrément fait l’expérience scientifique sur place !) quand on les trempait dans la sauce soya au vinaigre Chiang Kai et sambal des dumplings du début.
En conclusion de repas, on m’a proposé deux desserts, ce sont les seuls disponibles et ils n’apparaissent pas sur la carte. Comme on le sait, les restos de type asiatique ne sont pas très forts sur les desserts. Je me suis rabattue sur « Le Royal », un gâteau au chocolat, mousse et gaufrette praliné, qu’on m’a proposé avec un digestif-cocktail. Si le gâteau m’a ravi par la richesse de son chocolat et l’équilibre des textures, l’accord avec ce martini à base d’Apérol, m’a laissée plutôt perplexe… Jusqu’où va-t-on essayer de pousser le cocktail ? me suis-je demandé, en bonne conformiste que je suis. C’est beau d’être tendance, mais là… j’ai demandé un café.
Le mot de la faim
Ce que j’ai aimé dans ce restaurant, c’est la variété des saveurs et des présentations des plats. Savoureux, exotiques, joliment présentés, ils suscitent l’admiration et l’excitation à chaque fois qu’ils sont déposés sur la table. Des « oh » et des « ah » ainsi que des « wow », sont souvent entendus de la part de la clientèle émerveillée. Et quand on goûte, le trois quart du temps, on s’exprime par les mêmes onomatopées. C’est comme une petite fête à chaque coup d’œil ou à chaque bouchée. En plus, les prix sont vraiment raisonnables, ce qui nous fait encore plus aimer cette brasserie asiatique sympathique, digne petit frère du Jatoba. Même si certains plats ne sont pas encore tout à fait au point, on le sent parfois, cette imperfection nous fait encore plus aimer l’endroit, le distinguant son grand frère un peu plus sophistiqué. Ici, on vient pour avoir du plaisir dans une ambiance conviviale, décontractée.
Je vous suggère, si vous êtes en groupe d’au moins 6 personnes, d’essayer la formule « La Totale ». Ce concept ingénieux et gourmand permet de commander TOUS les plats du menu, et de les partager entre 6 personnes pour la ridicule somme d’un peu moins que 400 dollars. Ce qui permet de goûter à tout, tout, tout, pour environ 66 dollars par personne. Une formule festive qui va plaire à plusieurs, surtout aux foodies de tout acabit ! Et si vous avez aimé comme moi votre expérience, vous pourrez même ajouter à votre commande le « Send Thanks to Kitchen ». Cet item qui coûte 20$ est en fait une tournée de « shots » de Soju (eau de vie coréenne) offerte au staff de la cuisine !
KOZU
500, rue Rachel Est
(514) 524-4446
Ouvert du mardi au samedi de 17h à la fermeture