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Du neuf et des noeuds: Hollerado, Nosaj Thing et le «lazerbass doux»
Crédit: Il y a les coups de coeur et il y a les goûts acquis. Sûr, c’est chouette, l’amour au premier contact, mais il y a quelque chose de gratifiant à finalement «comprendre» ce qui nous a échappé, à «craquer le code».

Il y a les coups de coeur et il y a les goûts acquis. Sûr, c’est chouette, l’amour au premier contact, mais il y a quelque chose de gratifiant à finalement «comprendre» ce qui nous a échappé, à «craquer le code».

Évolution personnelle ou montagne qui vient à soi? Faut-il rejoindre l’art ou le laisser arriver à nous?

Je ne ferai croire à personne que le quatuor ontarien Hollerado a «progressé» depuis mon premier contact avec lui, en 2008. Il donne les mêmes prestations franchouillardes, brouillonnes mais énergiques, joue grosso modo les mêmes chansons… C’est moi qui ai juste tout bonnement cliqué, un beau jour. Comme ça, à force d’y revenir.

J’ai commencé par lever le nez sur ce classic rock canadian à souhait, par bâiller au son de ces mélodies anonymes. Puis, j’ai ressenti une certaine admiration en voyant à quel point le groupe arrivait à créer un lien avec le public. C’est facile de lancer des sourires, d’exprimer son plaisir de jouer, mais on parle ici d’une intense et naturelle atmosphère de convivialité. Un phénomène rare. Éventuellement, j’ai reçu «Got to Loose» en pleine gueule: un puissant hymne à la rédemption, un peu Weezer, un peu Springsteen. Je l’ai fredonné en faisant le ménage. J’ai eu hâte au show suivant. Je me suis tapé la réédition de Record in Bag, leur premier album, en boucle.

En février, j’ai été à la première soirée de leur résidence hebdomadaire d’un mois au Divan orange. La semaine suivante, j’y suis retourné. Au moment d’écrire ces lignes, le mois n’est pas terminé, mais tout indique que j’y retournerai à nouveau.

Qu’est-ce qui s’est passé? La théorie de la guérison aux allergies par exposition progressive, peut-être. Une surdose d’indie-rock fi gé m’ayant redonné le goût des saveurs plus corsées? Ou un tour de force par lequel Hollerado aurait réussi à retirer les numéros du rock à numéro? Chose certaine, c’est vraiment mon point de vue qui a changé, ici, et non la musique. 

* * *

J’ai toujours été fan d’électro et de hip-hop, mais d’une manière plus physique et cérébrale qu’émotive. Avec la tête et les membres, pas tant avec les tripes. Dernièrement, ce rapport a changé. J’écoute Nosaj Thing, Shlohmo, Robot Koch, Hovatron ou KenLo Craqnuques comme j’écoute du Leonard Cohen: le coeur grand ouvert, avec une sorte d’abandon émotif.

Et cette fois, on peut vraiment dire que c’est la musique qui a changé. Sur papier, tout ce beau monde ne fait rien de neuf: des mélanges instrumentaux d’ambient, de hip-hop, de glitch et de dubstep. En pratique, j’ai l’impression qu’ils sont en train d’ajouter une nouvelle dimension à la musique de machines. J’entends moins de collage et plus de composition véritable; un ameublement des hautes fréquences là où on s’occupait auparavant surtout des basses.

Contrecoup des complications légales liées au sampling? Flexibilité croissante des softsynths ou simple évolution du langage?

Voilà en tout cas une intéressante suite au phénomène lazerbass (que je me plais à surnommer «lazerbass doux» en attendant mieux). Et une autre bonne raison d’accepter de parfois réviser ses liens avec ce qu’on croyait déjà connaître.