«Il s’est passé tellement de choses depuis notre dernière visite, je ne saurais par où commencer», a lancé le chanteur Nic Offer à mi-parcours. Vrai que l’octuor américain a reçu quelques tuiles, ces dernières années: départ du percussionniste et chanteur John Pugh, décès du batteur Jerry Fuchs en novembre dernier, suite à une chute dans un ascenseur…
Mais clairement, l’octuor américain (dont le personnel est réparti entre New York, la Californie et l’Oregon) n’avait pas de temps à perdre avec l’émotivité, ni le blabla, le 30 juin au Club Soda. Sauf pour se moquer gentiment du jazz ou de présenter le prochain album du groupe… Offer et la choriste Shannon Funchess ont en effet «scatté» à la blague, comme pour signaler à quel point !!! (prononcer «chk chk chk») jurait un peu dans le décor d’un festival de jazz (on avait remarqué, merci), annoncé que le prochain album de la troupe, Strange Weather, isn’t it?, arrivait bientôt (le 24 août sur Warp, pour être exact) et prévenu les fans enthousiastes qu’il n’y aurait point de second rappel, en raison du manque de familiarité de la nouvelle formation avec le répertoire. Au-delà de ces déclarations, formulées avec fronde et humour grinçant, le groupe s’en est tenu à l’essentiel: son mélange très dansant de punk, d’afrobeat, de funk et de disco.
Entre quelques extraits du premier album éponyme de 2001 («Intensify») et du plus récent Myth Takes, de 2007 («Must be the Moon», «Yadnus» et le single «Heart of Hearts»), !!! a consacré l’essentiel de son heure sur scène au présent en misant sur les pièces de l’opus à venir.
Conçu à Berlin, Strange Weather isn’t it? est annoncé comme l’album le plus pop et le plus sombre de la troupe jusqu’à maintenant. Cela dit, bien malin qui pouvait faire la différence. La bande joue fort, intensément, basse distortionnée et percussions fourmillantes à l’avant.
Les grattements afrobeat du guitariste Mario Andreoni, les cuivres et la quincaillerie électronique font surtout office de décorations, et la voix haut perchée d’Offer, que les sourires en coin et les danses loufoques font ressembler à un gamin moqueur, laisse entendre plus de slogans, d’appels à la danse (ou à l’émeute?) que de mélodies distinctes. Sauf lorsqu’il descend de quelques tons, auxquels moments il évoque une sorte de Joe Strummer post-punk.
!!! sur scène, ça se passe donc essentiellement dans les hanches et le système nerveux. Et ça se passe bien: le groupe laisse rarement redescendre la tension et utilise le volume adroitement, pour créer des textures qui soulèvent et non simplement pour mitrailler les tympans.
Au moment où le dancepunk semble avoir fait son temps, cette maîtrise lui permet de conserver une certaine fraîcheur, une force de frappe bien réelle, quelque chose d’intemporel. Il n’y pas, cependant, de composition qui ressorte du lot, d’air qui reste en tête. Les chansons se fondent les unes aux autres dans un flot de rythmes acérés, un fort courant électrique, mais aussi une sorte de flou émotif finalement assez monocorde.
Par l’intensité de son jeu, !!! parvient quand même à induire la danse sans négliger l’oreille ou même la cervelle. C’est déjà plus que la machine à danser moyenne.