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Arthur H et Nicolas Repac présentent L’Or Noir au FIL

Qui de mieux que l’unique Arthur H pour dire les mots remplis de sensualité, de force et d'émotions brutes de ces poètes que sont Aimé Césaire, Dany Laferrière, James Noël, Daniel Maximin et Edouard Glissant? Avec L’Or noir, l’artiste à la voix rauque magnifique, accompagné de son complice et musicien Nicolas Repac, nous convie à un voyage des sens et de l'esprit. Un voyage absolu, intime et méditatif. Entretien. 
 

Messieurs, ça fait des années que vous collaborez ensemble. L'Or noir vous a-t-il offert une liberté nouvelle ?
Nicolas Repac :
Monsieur H, vous voulez commencer ?
Arthur H : Ha, merci. Et bien oui, parce que dans ce spectacle, on n’est pas enfermés dans le format d’une chanson qui veut plaire ou passer à la radio. On est vraiment libres de laisser nos âmes lyriques s'envoler. Moi je dis le texte, comme ça, de manière très simple. Nicolas, lui, a construit tout un univers sonore qui se mélange aux mots, les porte, les amène plus loin… Voilà. C’est un tapis de velours, mais c’est aussi un tapis volant.

Donc vous, Nicolas, vous avez travaillé comment ? Beaucoup d’improvisation?
Nicolas Repac :
  Au départ, oui, c’était des improvisations. Des impros qui se sont fixées rapidement pour devenir des morceaux. Puisqu’on parle de poésie noire, en filigrane, il y a toujours un petit peu l’Afrique, mais la musique n’est pourtant pas africaine à 100 %. Ça n’aurait pas été très intéressant, à mon avis. Je voulais plutôt faire venir la transe. Je pense que c’est un mot qui résume bien la voix d’Arthur et les mots qu’il dits. En somme, on arrive à une transe verbale et musicale.

Le public, lui, tombe-t-il dans une certaine transe à votre écoute? D’après les extraits vidéos, ç’a l’air très intense… comme le sont tous vos concerts d’ailleurs!
Arthur H :
C’est surtout très intime parce qu’il y a ces mots, cette langue, qui est assez complexe. Moi, je la dis assez doucement, donc forcément, il y a beaucoup d’écoute. C’est loin d’être un concert de rock, de trash métal… ou de trash hip-hop! En fait, on l’a conçu comme un voyage. Ça commence doucement, puis on visite différents territoires. Au début, on parle de l’âme de la terre. C’est assez tellurique, assez volcanique. Ça ouvre un grand espace. Après, il y a tout un passage assez macabre qui parle de la mort. C’est une espèce de descente aux enfers où Nicolas joue de la flûte préhistorique! Tout ça se termine par un truc beaucoup plus léger, beaucoup plus doux. Une espèce de lever de soleil très chaud. Comme je ne dis ni le nom des poètes, ni le nom des poèmes, ça ressemble à un long délire. Mais un délire qui, je l’espère, est d'écoute très agréable.

Les thèmes qui sont abordés dans ces textes, ce sont aussi des thèmes qui sont chers à votre œuvre. Vous vous retrouvez dans ces écrits ?
Arthur H
: Oui. C’est d’ailleurs la force de la poésie. Un poète, c’est quelqu’un qui écrit tout seul chez lui. Il est en contact avec la beauté du monde et  avec son monde intérieur. Nous, par la magie des mots, on vibre avec cet univers-là, on s’accorde. On est vraiment à l’unisson. Elle est belle, cette poésie, parce qu’elle me reconnecte à des choses très nourrissantes et elle ouvre un espace. Il y a vraiment quelque chose de large, comme s’il n’y avait pas de limites. Et ça, ça fait vraiment du bien.

Vous n’avez donc aucune contrainte, ni au niveau des mots, ni au niveau de la musique?
Nicolas Repac :
Il n’y a que les contraintes que l’on s’impose. Dans L'Or noir, on n'est pas pris dans le format des chansons, de la pop, dans les contraintes de structures. Pour moi, c’est…

…le bonheur?
Nicolas Repac :
Oui! (rires) Pas que le fait de faire des chansons ne soit pas le bonheur! Disons simplement que j’ai souvent le sentiment qu’on a essayé, par le passé, de faire rentrer pas mal de poésie dans nos chansons. Bon, c’est un peu bateau ce que je dis, mais c’est vrai qu’on est toujours un petit peu dans une forme d’insoumission par rapport à la norme établie. Arthur a toujours écrit de loooongs poèmes qui ont donné lieu à de looongs morceaux sur lesquels je me suis, moi, répandu avec des sons répétitifs, planants et rythmiques. On n’était jamais très loin des terres africaines: on avait la transe, la répétitivité, une forme de poésie sonore. Avec L'Or noir, je trouve qu'on est dans la continuité de cette démarche.
Arthur H : Oui, oui, c’est vrai…
Nicolas Repac : J’ai l’impression que ce qui occupait des fois 10 ou 15% d’un des disques d’Arthur, perdure et se transforme cette fois-ci en 100 %. C’est comme si je n’avais qu'un seul morceau à jouer! Le fait de ne pas mettre des bornes, ça nous permet d’enlever les repères pour que le cerveau soit préparé à recevoir la poésie.

Durant le spectacle, vous lisez des extraits de l’œuvre de Dany Laferrière. Comment avez-vous fait la rencontre de ce grand auteur montréalais?
Arthur H :
Hmm… Je pense que je l’ai rencontré par hasard, en feuilletant des livres dans les librairies. J’ai tout de suite été frappé par les images. C’est une langue très directe, très simple, mais qui a quelque chose de très vif. C’est tout de suite dans l’action, quoi, et tout de suite le paysage est ouvert, on peut être dedans. J’adore ! Ça me touche beaucoup cette économie de moyens. Je trouve ça très moderne et très généreux, parce que du coup, il n’y a pas de barrières entre le lecteur et l’écrivain. On est avec lui, de façon immédiate.

On peut voir un lien entre ce show et votre album, Négresse blanche?
Arthur H:
En fait, c'est sûrement un problème, mais je pense que je suis aussi une négresse blanche. C'est-à-dire qu'il y a une partie de moi qui est une femme, sans aucun doute et une partie de moi qui est noire, sans aucun doute. Évidemment, je suis aussi blanc et je suis aussi un mec. Mais ça peut m'arriver de me sentir très japonais.
Nicolas Repac: Et tu penses quoi des Sibériens?
Arthur H: Des Sibériens? J'en suis un. (rires) Sans hésitation.
Nicolas Repac: De toute façon, les musiciens, on est tous un peu métis. Sinon, comment faire de la musique sans être dans cette idée de partage? C'est impossible!
Arthur H: Impossible.

L’Or noir
Du 17 au 19 septembre, à 20h
À L'Usine C, dans le cadre du FIL

usine-c.com

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