De mémoire de journaliste, il y avait longtemps qu’un groupe n’avait pas été aussi attendu à Montréal que Metronomy. L’anticipation était palpable, mardi soir dans une SAT bondée. Problèmes aux douanes obligent, on comptait au moins une heure de retard à l’horaire… Voilà qui n’aidait pas à faire descendre la tension.
Autant dire qu’il s’agissait de la première visite de la troupe. En réalité, Metronomy a déjà joué à Montréal en août 2008 aux Saints, dans le cadre du MEG, mais c’était un mois avant la parution de Nights Out, l’album qui l’a fait connaître. Voilà trois ans, donc, qu’on se demandait comment cette relecture originale de la pop et du post-punk prendrait forme sur scène. Entre-temps, il y a aussi eu le plus dépouillé The English Riviera, bon candidat au titre du meilleur opus de 2011… Comme façon de créer l’attente, il n’y a pas mieux.
Passons outre la prestation très oubliable du tandem Class Actress en lever de rideau. Sympathique et élégant sur disque, son électro-pop a été livré de façon trop anémique pour bien passer le cap de la scène. Les grosses poses caricaturales des années 80 de la chanteuse Elizabeth Harper n’ont nullement aidé.
Metronomy, en revanche, a surpassé les attentes dès les premières minutes de sa prestation. Au visage soudainement plus humain que prenait sa musique, le quatuor a opposé un jeu ferme, précis et pleinement fidèle aux versions studio des pièces.
On a eu les grooves musclés, les lignes de synthé colorées, les harmonies vocales à quatre voix, les effets sonores; avec en prime une mise en scène efficace, ponctuée de modestes chorégraphies, de jeux de lumière à même les musiciens (qui portaient tous une lampe à la poitrine), mais aussi une spontanéité essentielle à toute bonne transposition live … Le compte complet, quoi!
Dans les moments plus rock, on n’était pas si loin de l’énergie de Duchess Says. Dans les moments plus pop ou dansants, la rigueur devenait reine et invitait aux déhanchements, aux fredonnements. Au défi pas évident de combiner l’atmosphère frénétique et surréelle de Nights Out à celle, plus pop et dépouillée, de The English Riviera, le groupe a répondu par un enchaînement assez irréprochable, introduit par la planante «We Broke Free», puis conclu par le craquant single «Everyting Goes my Way» (via Anna Prior, qui chante aussi bien qu’elle joue de la batterie) et la pulsative «Radio Ladio». Entre les deux, un beau crescendo fait des extraits les plus vivants des deux derniers albums («Love Underlined», «On the Motorway», «Holiday», «Heartbreaker», «Corinne»…), occasionnellement ponctué d’accalmies cependant pas dépourvues de punch («The Look», «She Wants»…).
Les groupes anglais ont la mauvaise habitude de débarquer chez nous avec des shows calibrés pour les arénas et les gros stades, au final souvent assez peu naturels. Pas de ça chez Metronomy. Oui, la bande use d’une certaine théâtralité, mais rien ne semble artificiel. Ses apprêts et ses petits tours sont légers, amusants, mais la musique – au demeurant assez décalée pour accueillir quelques excentricités – conserve le premier plan. Le leader Joseph Mount a par ailleurs conservé d’un bout à l’autre une agréable spontanéité, insistant pour intégrer un peu de français élémentaire à ses interventions.
Du design sonore à la force du jeu en passant par ce petit je-ne-sais-quoi qui maintient un pourcentage d’humanité, Metronomy a aussi bien compris ce qui fait un bon show qu’il a compris ce qui fait un bon disque.
Heureusement pour les personnes plus petites et ceux qui n’avaient pas de billets pour cette fois-ci, la rumeur veut que le groupe soit de retour au printemps au Métropolis.