Ça ne parait peut-être pas avec le genre de chronique que j'écris, mais je suis un gars plutôt timide. J'avais d'ailleurs déjà parlé de mon besoin d'alcool pour closer avec une fille (ou plutôt: pour qu'elle close avec moi).
Quand je suis gêné dans un bar ou une veillée, le concept est plutôt simple: je prends une gorgée de bière chaque fois que je suis mal à l'aise. La première pinte passe donc assez rapidement. C'est après 2 pintes que ça se place. J'arrête d'être over-self-conscious, je french comme du monde et surtout: je torche au babyfoot. En fait, c'est ce qui se rapproche le plus du vrai moi de bonne humeur qui n'est pas intimidé parce qu'une fille beaucoup trop cute lui jase ça.
Après 2 pintes, la vie est belle. Le seul désavantage à ce mini-état de grâce, c'est qu'il est difficile à maintenir. Il y a des soirs où tu t'en sors magnifiquement, et il y a des soirs où (même avec du sang abitibien) tu bascules. Ça passe du moi-dégêné-cool au moi-j'ai-été-timide-depuis-beaucoup-trop-longtemps-et-je-dois-rattraper-mes-envies-des-6-derniers-mois.
Tu deviens un peu quelqu'un d'autre (d'où mon ingénieux titre). Quelqu'un qui veut ton bien, mais qui ne connait pas trop le concept des conséquences. En même temps, il n'a pas le temps de se faire chier avec des détails du genre, il n'a que deux heures pour vivre, il faut que ça roule! C'est là que tu vois à quel point t'as beaucoup d'amour à donner.
Tu drunk text à tes contacts cute, tu drunk call à tes victimes réveillables, tu drunk tweet à tes pornstars préférées, tu drunk doigtes une inconnue dans une ruelle.
Ça a des bons côtés. Ça te sort de ta zone de confort. Mais ton jugement n'est pas à son meilleur donc le taux de gaffe demeure élevé. Par exemple, c'est dans ce genre d'état que tu peux décider sur un coup de tête de retourner avec ton ex en innocent.
C'est seulement le lendemain matin que le concept de conséquences refait surface. Ça coïncide avec le moment où la chienne te pogne. Avec le temps, t'as appris à connaitre assez ton Mister Scrap pour le craindre. Tu regardes ton cell et ton ordi et t'as peur d'aller constater les dégâts. Et ça, c'est quand tu te réveilles chez toi.
Pas étonnant que notre cerveau efface des bouts. Il n'assume pas toutes les saloperies commises. C'est ça que ça donne le refoulement. Quand tu n'oses pas assez à jeun, ça sort tout croche sur la go.
Mais bon, se dégêner, ça prend du temps. C'est ça qui est chiant. Si la fille au corps intimidant était d'adon, on aurait qu'à lui dire: «Bébé, laisse-moi juste le temps de m'habituer à toutes les images que tu me provoques, ok? Parce que là, j'ai déjà beaucoup de misère à t'écouter quand tu me parles avec cette bouche-là. En fait, je pense à beaucoup trop de choses pour maintenir un quelconque semblant de conversation qui a du bon sens. Si tu restes proche, je devrais revenir moi-même dans pas long. Donne-moi deux semaines, mettons…»
Deux semaines… ou bien deux pintes.