La guerre à travers les yeux d’une enfant soldat dans « Rebelle », un film à voir
Geneviève Vézina-MontplaisirAprès Le Marais, Truffe et La Cité, Kim Nguyen nous revient avec Rebelle, peut-être son film le plus abouti. Pour réaliser ce quatrième long métrage, le réalisateur s’est éloigné de sa réalité québécoise afin de présenter celle de Komona, une jeune adolescente vivant dans un pays d'Afrique subsaharienne jamais nommé. À 12 ans, Komona est enlevée par des guerriers rebelles et forcée à se battre, kalachnikov à la main. Dans cet enfer, il n’y a que Le Magicien qui lui apporte un peu de réconfort, un garçon de 15 ans qui veut la marier.
Après avoir passé des mois à Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo, afin de compléter le casting de son film et de le tourner, et après avoir vu son œuvre se voir attribuer une mention spéciale du jury œcuménique au dernier Festival international du film de Berlin, ainsi que sa protégée Rachel Mwanza remporter l’Ours d’argent de la meilleure actrice, Kim Nguyen est retour au bercail. Nightlife.ca s’est entretenu avec lui.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire et de réaliser un film sur les enfants soldats?
Je ne voulais pas vraiment faire un film sur les enfants soldat, mais bien sur un enfant soldat. J’ai été inspiré par l’histoire vraie, teintée de mythes, d’un garçon birman de 9 ans enrôlé de force dans une armée rebelle. Il a mené 100 soldats à la guerre car ceux-ci pensaient qu’il était une réincarnation de Dieu. Ensuite, au fil de mes recherches, j’ai réalisé que souvent les films sur l’Afrique mettaient en vedette un protagoniste blanc, et qu’à cause des nombreux organismes humanitaires présents sur ce continent, on avait tendance à oublier les capacités d’action et de résilience du peuple africain. Je n’avais pas envie de tomber dans le misérabilisme, mais plutôt de raconter une histoire d’amour en temps de guerre à travers les yeux d’une enfant soldat.
Que retenez vous de votre tournage en République démocratique du Congo?
Tellement de choses! On a tourné 35 jours là-bas et je dois dire que d'un point de vue créatif, ça été mon film le plus riche. Rebelle est vraiment un film charnière pour moi. Tous les gens que j’ai rencontrés là-bas ont nourri le film, certains lieux sont même devenus des personnages. Tourner là-bas est par contre assez particulier. Quand tu es blanc, tu es une cible, donc tu dois vivre dans des villas sécurisées. Même chose pour les lieux de tournage. Au départ, je pensais tourner le film avec une équipe de cinq ou six personnes, en mode «guérilla», mais j’ai finalement tourner avec une très grosse équipe, qui se déplaçait dans des convois armés de 34 véhicules!
Rachel Mwanza, une enfant de la rue de Kinshasa qui est aussi l’interprète principale de votre film, a reçu des mains de Jake Gyllenhaal le prix d’interprétation féminine au dernier Festival du film de Berlin. Craignez-vous qu’elle subisse le même sort que les enfants de Slumdog Millionaire?
Je ne crois pas; jusqu’à maintenant, ça se passe très bien. Nous avons une entente avec elle. Nous allons la suivre à distance. Son salaire lui sera remis sur une période de quatre ans. À Kinshasa, elle n’allait pas à l’école, alors elle va sûrement rester quelque temps à Montréal pour prendre des cours intensifs d’anglais et de français. Cela dit, c’est un défi énorme car nous ne sommes pas une œuvre de charité, mais nous avons une part de responsabilité vis à vis elle.
Rebelle
En salle dès aujourd'hui