J'me rappelle quand j'ai commencé à découvrir Montréal, avant même de m'y installer pour de bon. C'qui me fascinait plus que tout, c'était de voir comment la culture (la scène locale, notamment) prenait autant vie à travers les murs et les journaux locaux. Je travaillais, en plein centre-ville, et tous les matins, j'allais me chercher un café, au Second Cup du coin. Déjà, et en seulement 5 minutes (pour m'y rendre et revenir), j'me sentais "montréalisé". La culture m'attaquait de partout, je m'imprégnais d'elle.
Sur mon court trajet, je comprenais que je devais avoir un petit indice de ce qui se tramait sur la scène d'ici, à force de croiser les façades de buildings en construction tapissées d'une campagne d'amour pour CISM ou d'affiches promo des bands locaux du moment, sans compter l'abondance d'auto-collants sur les poubelles et téléphones publics de Bell. Mais ce chemin commandité par l'art n'aurait jamais été de pareille valeur s'il ne m'avait pas conduit vers l'essentiel: mon café, oui, mais plus particulièrement, le stand à journaux. Là, on m'offrait à la fois les défunts Mirror, ICI, NIGHTLIFE MAGAZINE, Bang Bang et les survivants Voir et Hour. J'avais l'heure juste sur plusieurs montres. Si Jon Lajoie devenait la nouvelle vedette montante du web, ça allait de soi qu'il fasse le front d'un de ces papiers, et merci, pas le même tabarnack de parvenu qu'on subit à chaque subvention dégotée.
On avait là un reflet plus juste de la réalité, des derniers artistes qui faisaient du bruit sur MySpace. Ça manque à Montréal, maintenant. On les aime bien Marie-Pier Arthur, Mara Tremblay, Pierre Lapointe ou Coeur de Pirate, mais n'y a pas qu'eux! Pis faudrait crissement en revenir. L'industrie d'la musique est encore à nous vendre les sensations des Francofolies d'années précédentes qu'elle a repêchées et pimpées à l'aide de photos délavées, de typo extra-lite pis de triangles. Please. Qui penses-tu tromper, bro?
Qui plus est, j'avais toujours le sentiment naïf que si la dernière vedette de la plus récente cuvée de Star Académie rentrait dans un café, elle devait se sentir misérablement imposteur d'admettre que les journaux spécialisés en culture se contre-câlissaient de ses dernières prouesses. La preuve tangible d'une résistance sauvage face aux géants de la musique et de la présence probante d'un underground, d'une génération à l'affût, avide de nouveautés.
Et niveau design, wassup? Qu'est-ce qui s'est passé? Qu'on parle des affiches dans le métro ou sur la rue, elles étaient à l'image des dernières tendances et plutôt inspirantes. Maintenant, on pourrait croire que l'Institut Trebas, reconnue pour ses ignobles panneaux publicitaires, sert de modèle pour tous. Et que dire du manque de rotation? Ma station de métro est déjà assez laide de calcaire l'hiver que je pourrais me passer de revoir, depuis des lustres, la réclame des p'tites filles atteintes de fibrose kystique qui se noient de l'intérieur.
C'est laid, fade, sale/trop propre et d'aucune façon représentatif d'une métropole culturelle, d'un Montréal que je vis derrière mes écrans tous les jours. À l'ère de l'identité numérique, des bandcamp et des YouTube, c'est maintenant et plus que jamais, que la «vraie vie» devrait venir en appendice avec le web. Pas en 2005, quand rien n'était encore en place. Mauvais timing. Mais bon, budget oblige, thanks to Harper, vous me direz.
Je te déteste.