Des films érotiques «made in Québec» pour une Saint-Valentin des plus charnelle
Michael-Oliver HardingSoyons francs: à moins que vous connaissiez la filmographie de Kate Hudson dans le détail ou que vous classiez vos romans Harlequin par année de publication dans votre bibliothèque, la St-Valentin ne revêt probablement pas une importance particulière dans votre vie. En cette journée où tout est permis en matière de démonstrations horripilantes d’affection en public, pourquoi ne pas prôner un peu de retenue? (PTI, les marques de tendresse/galanterie/libido sauvage ne sont pas contre-indiquées les 364 autres jours de l’année…)
Profitez-en pour revoir certaines «œuvres» cultes de la vague de cinéma érotique qu’a connue le Québec à la fin des années 60 / début 70? À défaut de vous émoustiller tel que l’auraient souhaité ces grands esprits de l’époque peace and love, ces quasi-«films de fesses» démontrent sans l’ombre d’un doute que nous étions précurseurs en matière de cinéma jouant dangereusement la carte de l’érotisme. Sorties en salles avant même l’incontournable Deep Throat (1972) – un des premiers pornos à grand déploiement avec scénario et personnages qui s’expriment aussi avec le haut du corps – les trois productions ci-dessous ont fait fureur auprès des adeptes de notre temple de l’érotisme, le Pussycat (rebaptisé Cinéma L’Amour en 1982). Gâtez-vous, chers Valentins voyeurs du NIGHTLIFE!
Valérie (1969)
Denis Héroux
Danielle Ouimet-Tendre et sensuelle Valérie by francomac
Le synopsis dit tout: Valérie, jeune orpheline élevée par des religieuses en pleine campagne, quitte pour Montréal, où elle s’empresse de faire un doigt d’honneur assez spectaculaire à toutes ses institutrices ayant fait vœu de chasteté : elle devient danseuse topless et prostituée! Take that, province puritaine et son clergé tout-puissant! Par contre, il serait bien difficile de défendre les mérites artistiques du film (surtout la petite amourette de notre Valou avec un artiste peintre). Valérie (interprétée par une jeune Danielle Ouimet, première actrice québécoise à se dénuder au grand écran) obtient à l'époque un grand succès commercial, est acheté dans plus de 40 pays et déclenche cette vague de cinéma érotique qui a certainement contribué à notre réputation très enviable de province aux «mœurs légères». You go, Valou!
Après ski (1971)
Roger Cardinal
Céline Lomez & Daniel Pilon-Après-ski by francomac
Qualifié de film de «sexploitation québécois», Après ski est si mauvais qu’on prend un malin plaisir à en rire (dans la veine de Showgirls ou de Glitter). Il faut se souvenir du climat politique conservateur qui régnait encore en 1971 pour comprendre comment ce film – somme toute très softcore – a pu être banni et ses bobines même saisies par une cour québécoise! Cette comédie un brin cochonne suit quelques profs de ski des Laurentides en quête perpétuelle de nouvelles conquêtes au lit. En 2008, son statut de « camp classic » en devenir a d’ailleurs incité le distributeur québécois Équinoxe à sortir le film en DVD. Avec une distribution comprenant René Angélil, Janine Sutto, Francine Grimaldi et une jeune Angèle Coutu, et une version doublée aux États-Unis qui s’intitule Snowballin, difficile d’y résister!
Deux femmes en or (1970)
Claude Fournier
Ce succès monstre du box-office québécois (2 millions de spectateurs! – un nombre d’entrées inégalé jusqu’à l’arrivée du film Les Boys en 1997) ne se prend jamais trop au sérieux, ce qui explique pourquoi le public y a tant pris plaisir. Deux voisines cloîtrées dans leur quotidien plate à mort de banlieusardes à Brossard décident « d’exploiter leurs dons » en se mettant à sauter tout le voisinage, y compris Yvon Deschamps, Donald Lautrec et Gilles Latulippe.
Je vous laisse sur cet échange succulent entre lesdites voisines Violette (Louise Turcot) et Fernande (Monique Mercure) :
F : Combien de femmes exploitent leurs dons? (Elle lui tend un livre) Le sexe, ma cocotte, c’t’un don.
V : (gênée mais visiblement titillée à l’idée) Tu crois pouvoir coucher comme ça avec n’importe qui?
F : Ben, avant des connaître, nos maris aussi étaient des n’importe qui.
V : (refusant de s’aventurer en terrain de bad girl) Ah, c’était pas la même chose.
F : Pourquoi??
V : … Si on se fait prendre?
F : Bah, voyons, fais pas l’idiote. Yvon, y’est au bureau toute la journée pis Bob, y part deux ou trois jours par semaine. (silence) T’aimes ça, passer tes journées seules? As-tu déjà couché avec d’autres que Bob?
V : (les yeux s’illuminant) Avant de me marier, oui!
F : Avant ou après, ç’a même chose! On est bêtes, nous autres, les femmes… On attend. Faut en profiter pendant qu’on est désirables, tu trouves pas?
(Extrait vidéo disponible sur le site de Télé-Québec)