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Critique de «COCK»: une pièce qui vous en met plein la figure…
Crédit: Sarah Dellah

Cock fait partie de ces rares productions qui enchaînent les in-your-face vous obligeant à réfléchir à votre vision des relations humaines, en plus de vous faire éclater de rire toutes les cinq minutes. Traduite, mise en scène et jouée par Alexandre Goyette, aux côtés de Michel-Maxime Legault, Geneviève Côté et Daniel Gadouas, la pièce a bien plus qu’un titre pour faire jaser.

Écrite par le dramaturge Mike Bartlett, l’histoire est celle d’un triangle amoureux impliquant John (Legault) et son copain de longue date (Goyette), ainsi qu’une femme (Côté) qu’il a rencontrée par hasard et pour qui il croit développer des sentiments. Alors que le couple gai bat de l’aile depuis longtemps, l’étincelle ressentie pour la demoiselle fait exploser une série de questions dans l’esprit déjà fort nébuleux de John.

Est-il soudainement attiré par « les » femmes? Pourquoi devrait-il se confiner au groupe des homosexuels, une catégorie archaïque inventée par les baby-boomers pour se rassurer et défendre leurs droits? Les pulsions qu’il ressent à l’égard de la jeune femme sont-elles motivées par un soudain désir d’avoir une famille et une situation de vie qu’il croyait depuis longtemps associée au paradigme de l’hétéronormativité? Se pourrait-il qu’il soit en amour avec elle? Ressent-il encore quelque chose pour son amoureux des 13 dernières années, avec qui il partage un quotidien d’engueulades et d’habitudes? Est-il tout simplement allé chercher chez un autre être humain, qui s’adonne à être une femme, ce que son homme ne lui donnait pas?

À travers sa remise en question, John joue un jeu de mensonges et de fantasmes qui nous confrontent et nous divertissent du début à la fin. Rien n’est tout à fait blanc, ni tout à fait noir dans le monde de Mike Bartlett. Son œuvre est franchement drôle, fabuleusement aguichante et fichtrement jouissive. Son propos est brillant, punché et ultra rafraichissant. La traduction de Goyette est précise et fort efficace, alors que les quatre acteurs sont pleinement investis.

Petits bémols
Alexandre Goyette possède une maîtrise évidente des ressorts comiques et il est parfaitement crédible dans son interprétation. Toutefois, on se questionne sur la pertinence de donner autant de maniérisme à son personnage: gestuelle prononcée des mains, voix plus aigüe, excès un brin caricatural dans les émotions. Ironiquement, si on écoute bien ce que dit la pièce, l’homosexualité pourrait n’être rien d’autre qu’une définition simpliste et maladroite d’une préférence sexuelle, et non une identité qu’on identifie automatiquement dans l’extériorité.

On remarque également que le personnage de John, être visiblement perdu, aurait mérité d’être étoffé davantage du côté de l’interprétation. Ce n’est pas parce qu’on compare son identité et son allure physique à un dessin au crayon, dans lequel on n’a pas encore colorié, que son interprète doit jouer le « vide » pendant une si longue partie de la pièce. Une personne qui ne sait pas encore qui elle est n’est en fait rien d’autre qu’un être plein et entier qui n’a pas encore appris à comprendre ce qui se trame en lui.

Malgré ces minuscules irritants, Cock est une petite merveille qui mérite de faire salle comble à l’Espace 4001, avant d’être reprise par un plus grand théâtre afin de rejoindre un vaste public.

COCK
Du 30 janvier au 15 février 2014
Espace 4001 | 4001, rue Berri (Billetterie: 514.282.3900)

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