Je suis natif de Pointe-Calumet. Oui, oui, le Beach Club pis les glissades d'eau. Je sais, très drôle, les douchebags pis toute. J'y ai habité une grande partie de ma vie, c'est paisible. Pour me rendre à Montréal, je devais emprunter la piste cyclable qui mène jusqu'au train de banlieue. Je m'en ennuie encore, des fois.
Mais cette année, je suis en deuil de mon petit village de banlieue. Le processus est en cours depuis une bonne décennie, mais c'est seulement aujourd'hui que je le remarque et comprends réellement ce qui s'est produit.
Je ne pourrais me prononcer pour toutes les municipalités banlieusardes, mais Pointe-Calumet est devenue tellement fade. Avec les années, j'ai fini par oublier ce qu'elle avait déjà été; je rêvassais du mode de vie urbain que pouvait m'offrir Montréal pis m'étais finalement convaincu qu'après tout, sortir le moins souvent possible quand il n'est pas question de plage, club ou BBQ, c'était ça, la banlieue et que ç'avait toujours été comme ça.
Mais non, quelque chose d'essentiel avait changé. La coeur de la ville s'est éteint.
Quand je croisais les gens que j'avais côtoyés durant le primaire et secondaire, ils étaient pour la plupart en voiture; me klaxonnaient en guise de salut. Moi j'étais à pied. Le seul con qui se rendait encore au dep en marchant.
On me le répétait souvent: «T'attends quoi pour aller chercher ton esti d'permis? C'pas une vie, ça.»
Les sets de patio du voisinage, c'étaient pour faire beau dans la cour ou sur la galerie. Rarement je voyais le monde en bénéficier. Les parcs pour enfants quasi déserts, les espaces verts où il fait bon relaxer n'accueillaient jamais les âmes rêveuses qui auraient pu s'adonner à un peu de lecture. Les crèmeries qui ouvraient n'arrivaient lamentablement pas à survivre.
La seule épicerie du hood s'est vue fermer et le gym déménager. La piscine municipale n'est plus ce lieu de rencontre qu'elle était, depuis qu'il faut payer. Le skatepark totalement rayé de la map. On demande aux jeunes de ne pas flâner, même si nulle part ils ont pour chiller et on leur remet des contraventions quand on les prend dans les parcs passé 10:00-11:00. Les activités estivales sont portées disparues.
Ça fait que c'est fade pis faut que tu t'équipes dans ta maison de choses qui sauront te divertir. Pis ton auto, presque obligatoire, t'amène faire les commissions dans les villes voisines parce que la tienne n'a plus rien à t'offrir.
C'est en me promenant dans mon nouveau coin de quartier (je rep #verdunluv depuis maintenant 2 ans) que j'me suis tapé une crise de nostalgie, cette semaine.
Mon enfance défilait sous mes yeux alors que je croisais des sourires, du monde qui sort de chez lui, sans destination ni but précis, juste pour profiter des gratuités que nous câlisse en pleine gueule la nature. Des gens qui placent des chaises sur le balcon et actually prennent le temps de s'y asseoir.
Sortir dehors, man. C'est tout simple. Quand même fascinant que j'en sois à m'émerveiller à seulement voir des gens franchir une porte afin de profiter de l'air frais. Ça n'existe presque plus, à Pointe-Calumet, ça. Les cours s'apparentent à de mini-villages fantômes. Les bords de l'eau ne sont plus autant convoités.
Verdun d'aujourd'hui me rappelle beaucoup ce que j'ai connu de mon village d'autrefois qui se voulait pourtant tout en bonheur, tout en action. Mais il a fini par s'éteindre à force que les gens refusent de vivre. Que le comité municipal semble s'en crisser.
Et à chaque fois que Verdun lui ressemble, lourd devient mon coeur et je m'aperçois que j'ai un deuil à faire, que plus jamais cette municipalité -qui n'a pas tant à voir avec le Beach Club- ne réservera une place à des gens comme moi.
Qu'importe où j'irai, je tenterai instinctivement de la recréer, avec les souvenirs qu'il me reste d'elle. Dans le temps que la paresse n'avait pas pris le dessus sur nos vies.
Je vous déteste.