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La sublime installation berlinoise «Lichtgrenze» célébre la chute du Mur et 25 ans de liberté!
Crédit: LICHTGRENZE, Brandenburger Tor, Kulturprojekte Berlin (Christopher Bauder / Photo: Daniel Bueche)

Le 9 novembre est une date charnière dans l’histoire du monde. Il y a maintenant vingt-cinq ans de cela, la détermination du peuple est-allemand, ainsi que l’affaiblissement généralisé du bloc soviétique, menait à la chute du Mur de Berlin le 9 novembre 1989. L’épisode clôturait la lente agonie d’un rêve — certains y voyant même la «fin de l’Histoire» — la fin de la dichotomie est-ouest et du duel capitalisme contre communisme. Afin de commémorer l’un des moments les plus importants du vingtième siècle, la ville de Berlin s’ornera, du 7 au 9 novembre, de la sublime installation Lichtgrenze, conçue par les frères Christopher et Marc Bauder. C’est plus de 8000 ballons lumineux qui se dresseront sur 23 km du parcours de l’ancien Mur, ainsi que 14 écrans DEL qui diffuseront, en boucle, des images d’archives relatant l’histoire du Mur. Pour en savoir plus sur ce projet grandiose, je me suis entretenu avec Christopher (artiste en arts médiatiques et designer) et Marc (cinéaste).
 
Le 9 novembre 1989, j’avais presque 10 ans, je me rappelle donc vaguement cette époque où les «méchants» communistes constituaient une menace de tous les instants. Je garde quelques flashs où, assis devant la télé, j’observe une foule en liesse qui danse au sommet d’un mur; des souvenirs embrumés, teintés du soulagement de ne plus stresser face à la peur d’une soudaine attaque atomique des Rouges. Les frères Bauder étant un peu plus âgés que moi, tous deux dans la jeune quarantaine, et Allemands de surcroît, j’étais curieux de savoir comment ils avaient vécu l’événement. Leurs réponses m’ont quelque peu surpris: «Nous avons grandi sur les rives du lac de Constance, très loin de Berlin, où nous n’avions pas de parents ou d’amis. C’est donc à la télévision, de manière très abstraite que nous avons vécu la chute.» Marc me raconte qu’il prenait des clichés des images télé, avec son appareil photo, ayant vaguement conscience d’assister à quelque chose d’historique. Ce n’est que deux mois plus tard, lors d’un voyage scolaire à Berlin, que Christopher réalise l’ampleur du changement: «Quand j’ai vu les deux côtés du mur, quand j’ai pu circuler librement entre ce qui, dans mon esprit d’alors, constituait deux pays distincts, c’est à ce moment que j’ai compris que nous n’étions en fait qu’une seule Allemagne. Même si, et cela m’avait frappé, les différences entre les deux entités étaient flagrantes.»
LICHTGRENZE, Spreeufer, Kulturprojekte Berlin (Christopher Bauder / Photo: Daniel Bueche)
LICHTGRENZE, Checkpoint Charlie, Kulturprojekte Berlin (Christopher Bauder / Photo: Daniel Bueche)
LICHTGRENZE, Park am Nordbahnhof, Kulturprojekte Berlin (Christopher Bauder / Photo: Daniel Bueche)
L’idée derrière Lichtgrenze était en gestation depuis très longtemps dans l’esprit des deux hommes. C’est avant même les célébrations du 20e anniversaire de la chute qu’ils commencent à la développer: «Nous nous sommes dit que la structure devait être visible, de manière abstraite, mais dans sa totalité. Nous voulions évoquer le contraste entre la lourdeur, la noirceur et la masse du Mur, et quelque chose de léger et d’éphémère, d’où l’idée des ballons lumineux, afin d’attirer les gens. Nous voulions aussi démocratiser la commémoration, pour que tous puissent en profiter, et non pas seulement quelques politiciens et dignitaires triés sur le volet.»
 
La mise en place d’une installation de cette envergure ne se fait pas en un instant. Plusieurs centaines de personnes y travaillent depuis mardi dernier, s’assurant que tout soit prêt pour l’inauguration le vendredi 7 novembre à 17h (CET). «Ce fut un travail très ardu d’ingénierie mécanique et électrique menant à la conception de pièces résistantes qui soient tout de même agréables à l’œil. Chaque ballon/tige est composé de 40 éléments distincts, c’est donc plus de 400 000 items que nous avons dû produire dans 17 pays différents.»
 
Christopher ayant visité Montréal en 2009 — pour présenter le magnifique ATOM dans le cadre du festival MUTEK —, je lui ai demandé s’il voyait des parallèles entre notre ville et Berlin: «J’ai passé environ une semaine à Montréal, afin de répéter et de roder l’installation. J’ai beaucoup aimé le quartier entourant le Chinatown; j’y ai retrouvé un certain esprit berlinois à travers les petits bars et les boutiques. J’ai aussi trouvé les gens très amicaux, ce qui est un peu moins comparable à Berlin. (rires)» Même si Christopher considère que les gens de Berlin sont moins amicaux que ceux d’ici, je peux vous affirmer que les deux frères sont éminemment sympathiques. Ils sont aussi géniaux et Lichtgrenze est l’expression parfaite de la grandeur de l’esprit humain lorsqu’il se tourne vers le Beau.
 
Lichtgrenze, présenté dans le cadre de 25 Jahre – Mauerfall 2014 (25 Years – Fall of the Wall 2014
Du 7 au 9 novembre | berlin.de/mauerfall2014/en/highlights/lichtgrenze

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