À la lumière des évènements chaotiques de cette nuit, on ne peut que remettre en doute les récentes décisions du recteur Robert Proulx. Au lieu d’instaurer «un climat de respect propice à la poursuite des activités académiques», l’injonction qui interdit la levée de cours n’a fait qu’envenimer les choses.
La vidéo a fait le tour de la toile depuis hier. Décontenancé par des étudiants bien décidés à ne pas respecter l’injonction, accordée par la Cour supérieure la semaine dernière, le rectorat de l’UQAM a pris les grands moyens en envoyant le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour s’assurer que les cours aient bel et bien lieu. Résultat : 22 personnes arrêtées.
La réaction des étudiants n’a évidemment pas tardé. Hier soir, une centaine d’entre eux ont pris possession du pavillon J.-A.-DeSève pour protester. Un peu avant, «une délégation comptant des étudiants et des chargés de cours avait tenté de convaincre le recteur Robert Proulx de renoncer à l’injonction empêchant les étudiants grévistes de lever les cours et de cesser de faire appel aux forces policières à l’intérieur de l’UQAM», selon ce que nous apprenait La Presse Canadienne ce matin.
Entêté, Proulx a sans aucun doute provoqué la suite des choses qu’on connaît : l’occupation du pavillon qui, même si elle avait débuté dans une atmosphère soi-disant festive, a pris une autre ampleur lorsque certains étudiants radicaux ont commencé à barricader la porte d’entrée et à vandaliser du mobilier. Ainsi, le recteur a fait appel au SPVM qui, pour entrer dans l’établissement, a dû faire un «énorme trou dans une vitrine» – toujours selon la même source.
Le jeu du chat et de la souris qui s’en est suivi dans les rues avoisinant le pavillon a de quoi déconcerter. Gaz lacrymogène et gaz de poivre du côté des policiers ; bacs à fleurs et poubelles du côté des étudiants. Même si la grève est loin d’avoir l’ampleur de celle de 2012, le dérapage, lui, est déjà plus fort, ce qui n’annonce rien de bon pour l’avenir.
Étudiants à blâmer aussi
Évidemment, les étudiants ont leur part de responsabilités dans tout ce chaos perpétuel. Certains mandats de grève, obtenus de façon discutable, peuvent être remis en cause – et avec raison – par certains étudiants qui ne croient pas au mouvement de grève actuel, pas assez clair ni défini dans l’ensemble. Ce n’est certainement pas en intimidant ces derniers ou en vandalisant des locaux que la cause gagnera du terrain.
Reste que les agissements du rectorat n’ont pas leur raison d’être à plusieurs égards.
En refusant obstinément de prolonger le trimestre d’hiver, même si certains mandats de grève ont été obtenus de façon démocratique, Proulx se met à dos étudiants, chargés de cours et professeurs. Ces derniers ont d’ailleurs été informés qu’il n’y aurait pas de reprises de cours rémunéré. «Cette décision va à l’encontre de tout ce qui s’est fait dans l’histoire de l’UQAM et passe outre les résolutions de la Commission des études», a envoyé la présidente du Syndicat des chargés de cours, Marie Blais, selon un article paru dans le journal Métro hier. Certains professeurs ont d'ailleurs joint leurs voix à des étudiants pour demander la démission du recteur ce matin.
Le conflit se radicalise, les tensions sont vives. Alors qu’il montrait tout récemment des signes clairs d'essoufflement, avec les conflits internes de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ) et les mandats de grève non reconduits de plusieurs associations, le mouvement de contestation étudiante reviendra en force dans les jours qui suivent.