Voici l’occasion rêvée de découvrir ou de redécouvrir le Mois de la Photo à Montréal, puisque la 14e édition s’expose jusqu’au 11 octobre prochain. Les œuvres proposées parlent autrement d’aujourd’hui et nomment la réalité contemporaine avec ses codes changés, ses enjeux de société et ses blessures empreintes d’humanité. La surabondance et la massification des données visuelles auxquelles nous avons accès quotidiennement sont abordées et réfléchies sous le thème de l’image à l’ère post-photographique. Vingt-neuf photographes nous offrent un regard démultiplié et vibrant sur notre reflet à l’époque du numérique. Parmi eux, 5 artistes ont capté notre attention par leurs propositions audacieuses, lucides et actuelles.
1. After Faceb00k
À la douce mémoire < 3 (2015), After Faceb00k
Le collectif québécois After Faceb00k commémore la mémoire numérique qui persiste sur les réseaux sociaux après la mort d’un individu. L’installation À la douce mémoire < 3 (2015) prend la forme d’un cimetière de comptes préservés. Par l’intermédiaire d’une multitude de photos de leur vie, l’identité des défunts subsiste et ceux-ci restent immortels à travers la technologie. Le rapport au deuil en est-il modifié? Le Musée McCord présente cette perspective et se recueille devant la mémoire des âmes virtuelles révélées par le collectif. (Musée McCord, jusqu’au 10 janvier 2016)
2. Liam Maloney
Messages textes pour la Syrie, Liam Maloney
L’artiste ontarien Liam Maloney aborde la fulgurante connectivité que permettent les téléphones intelligents lors des soulèvements citoyens et politiques. Avec la très intime installation Messages textes pour la Syrie (2014), l’artiste donne un visage et une résonnance à la combativité et à la force de ceux qui tentent de rester en contact avec un proche, alors que la guerre les sépare. Dans le cadre de ce projet, il est aussi possible de recevoir des messages échangés par les réfugiés au Liban. (Galerie B-312, jusqu’au 10 octobre 2015)
3. Jacques Pugin
Les cavaliers du diable (2008-2013), Jacques Pugin
Avec Les cavaliers du diable (2009-2013), le photographe franco-suisse Jacques Pugin souligne les sombres nuances de la barbarie humaine. En appliquant un double traitement à des photos satellitaires, il capte le ravage des territoires lors de la crise au Darfour. Malgré la désolation du propos, la lumière de Pugin porte aussi le silence de la dévastation et l’impuissance qui persistent devant le sol marqué des zones de conflits. (Centre Phi, jusqu’au 10 octobre)
4. Paul Wong
Year of GIF, Paul Wong
Paul Wong, artiste multimédia de la Colombie-Britannique, catalogue et organise un imposant volume d’images dans ses œuvres. La galerie Joyce Yahouda propose Multivers, On y retrouve Solstice (2014), une installation reportant 24 heures en 24 minutes. À la manière d’une caméra de surveillance, on scanne les interactions de «Crack Alley», haut lieu d’échanges de drogues à Vancouver. Dans #LLL, Looking, Listening, Looping (2014), 40 écrans déversent un fort torrent d’éléments visuels entrecoupés de selfies, alors que Year of GIF (2013) opère tel une collection de flipbooks virtuels créés à l’aide d’un téléphone intelligent pendant un an. Surenchère visuelle garantie. (Galerie Joyce Yahouda, jusqu’au 10 octobre 2015)
5. Adam Broomberg & Oliver Chanarin
Chronicles 1 & 2, Divine Violence (2013), Adam Broomberg & Oliver Chanarin
À Berlin, en 2011, le duo provenant de l’Afrique du Sud et du Royaume-Uni découvre un exemplaire de la bible annoté par Brecht, dans lequel on avait glissé plusieurs images. De là nait Violence Divine (2013), un questionnement sur la neutralité des archives. Le projet juxtapose des chapitres entiers de la bible, des photos de guerres et de génocides qui exposent la catastrophe, ainsi que des images banales de loisirs tranquilles. Les auteurs adressent ainsi un intéressant propos quant aux degrés de violence que peuvent évoquer les images d’archives. (Parisian Laundry, jusqu’au 11 octobre 2015)
Le Mois de la Photo à Montréal
Jusqu’au 11 octobre 2015 | moisdelaphoto.com