Il n'est pas toujours facile de suivre le méditatif réalisateur Terrence Malick (Badlands, The Thin Red Line), n'est-ce pas? Ce n'est pas tellement différent avec son plus récent film, Knight of Cups (le titre se réfère à une carte du tarot), qui raconte un récit fragmenté, personnel, poétique et explicitement spirituel qui est à l'image de son artisan.
Dans ce portrait mystique, un scénariste (Christian Bale) vivant à Los Angeles tente de donner un sens aux événements étranges qui se produisent autour de lui. Alors qu'il a une carrière prolifique à Hollywood, sa vie est marquée par le vide existentiel. Hanté par la mort d'un frère et les circonstances terribles de l'autre, il trouve un réconfort temporaire dans l'excès hollywoodien qui définit son existence. Les femmes fournissent une distraction à la douleur quotidienne qu'il doit supporter, et chaque rencontre le rapproche d'un nouveau sens à sa vie. Le film est divisé en huit chapitres (chaque section représente une lame du tarot, sauf pour la conclusion), en plus d'un prologue, chaque partie est vaguement fondée autour de la relation entre le personnage central avec quelqu'un dans sa vie. À noter également que le temps et l'espace est aussi fluides que l'océan Pacifique, dans lequel les personnages pagayent et flottent pendant que nous voyons Christian Bale glisser à travers une succession de relations éphémères avec une multitude de femmes interprétées entre autres par Imogen Poots, Cate Blanchett et Natalie Portman.
Dans ce long métrage expérimental et contemplatif, nous voyons Christian Bale arpenter les prairies, les fêtes, les maisons immaculées et souvent vides et des appartements comme un agent immobilier nostalgique. Ce dernier émane comme un esprit errant à travers les paysages de sa propre vie, un sentiment intensifié par la sublime photographie d'Emmanuel Lubezki (Gravity, Birdman); le travail d'une caméra qui flotte au-dessus des têtes. Le personnage de Bale ouvre à peine ses lèvres, bien que nous l’entendions en voix off, ce qui renforce l'idée que ce film est peut-être un ensemble de souvenirs teintés par la triste sagesse rétrospective alors que son protagoniste saute d'un monde à l'autre.
En matière de style et de thèmes, on reconnaît la touche onirique et les réflexions des deux derniers films du cinéaste américain : The Tree of Life (2011) et To the Wonder (2013). Toutefois, avec Knight of Cups, la recette devient lassante et même autoparodique. Ceci étant dit, la vision de Los Angeles qu'offre le réalisateur est saisissante et indélébile. La représentation de la ville est à la fois familière et étrange, belle et vide, un lieu où le réel et le surréel sont nés pour coexister. Un théâtre d'un autre monde pour un conte surnaturel.
Plusieurs spectateurs se perdront dans les philosophies de la récente réalisation de Malick, le film est donc à vos risques et périls. C'est aussi une question de goût: vous pouvez soit vous laisser transporter dans l'imaginaire et le groove mélancolique de ce film ou tout simplement vous endormir. Même les amateurs de cinéma d'auteur pourront trouver Knight of Cups en dehors de leur zone de confort.
Comme les deux dernières réalisations du cinéaste, Knight of Cups cherche à donner un sens à un homme disloqué souffrant de son passé. Il tente également de trouver des réponses qui semblent provoquer encore plus de questions. De ce fait, Knight of Cups est un film métaphysique qui peut être perçu comme un rêve éveillé que seul son créateur pourrait expliquer ou même apprécier, ce qui signifie que l'œuvre est également exaspérante et impénétrable comme elle peut être à la fois fascinante et ouverte à la discussion.
Knight of Cups
En salle dès le 18 mars