Forte d’une réputation particulièrement enviable auprès du grand public, des critiques littéraires et des donneurs de prix, L’Orangeraie de Larry Tremblay est désormais présentée sur les planches du Théâtre Denise-Pelletier, dans une version scénique aussi froide que poignante.
On se sent davantage interpellé lorsque le moment fatidique approche et que les jumeaux fomentent pour déjouer les plans du père, mais la grande force de L’Orangeraie se déploie principalement lors de la deuxième moitié, alors que le jeune survivant habite maintenant une grande ville francophone d’Amérique. Un lieu où la neige et le froid sévissent à l’extérieur, pendant que son cœur est pétri de remords et de douleurs.
Avec l’aide de Mikaël, un jeune enseignant et metteur en scène, Amed/Aziz arrivera à sortir de sa torpeur, à se servir de la fiction pour raconter sa vérité, à mettre des mots sur son mal. Les échanges entre le jeune immigrant et l’homme de théâtre sont porteurs de sens et de puissance. Alors que le jeune homme secoue son enseignant sur la pièce de théâtre guerrière qu’il a écrite sans jamais l’avoir vécue, le metteur en scène guide son acteur sur le chemin de la résilience et de la libération.
Tous les comédiens de la pièce font preuve d’un talent manifeste, mais la production doit une fière chandelle à Gabriel Cloutier-Tremblay, l’interprète d’Amed, dont la force émotive vient nous happer de façon entière et brutale. En portant les paroles de sagesse de son personnage sur la spirale de la violence et tout ce qu’il a compris de la guerre, le jeune comédien ouvre les portes qui étaient restées fermées en nous durant la première partie, s’empare de notre cœur, le fait culbuter dans tous les sens et nous laisse pantois, les larmes aux yeux et l’âme à jamais chavirée.