La mise en scène signée Frédéric Dubois, sobre, élégante et raffinée est appuyée par des moyens technologiques efficaces tant visuels que sonores faisant évoluer les personnages dans un univers où l’intemporalité flotte dans un « Temps à Venir », celui du « grand Départ » vers l’Au-delà. Bravo à Caroline Ross pour ses éclairages tout en espaces fondus et à Pascal Robitaille pour sa musique d’appoint à la portée de la ligne du temps! Les deux vieillards habillés des créations vestimentaires de Linda Brunelle, hardes loqueteuses aux mauves et gris effacés et poussiéreux se minéralisent déjà dans les linceuls de la Grande Faucheuse.
Puis, les invités-fantômes (les chaises) font leur apparition. Mise en scène digne d’un ballet moderne où ces créatures-chaises envahissent tout l’espace scénique, les faisant s’éloigner l’un de l’autre, se perdant de vue, s’entendant sans se voir. Le couple se dédouble, prémices de la profonde solitude dans la mort. Le langage s’investit dans l’écho !
Or, l’Orateur muselé, privé du langage, nous laisse sans voix et nous renvoie à nous-mêmes, à notre propre message, à notre monologue intérieur et au grand vide de la vie. Est-ce notre propre langue et notre propre sens qui nous échappent ? Toute la pièce cristallise ce dernier instant avant la mort, ce moment où, apparemment, défilent tous les événements de notre vie, cette parenthèse dans le long discours de notre vie. Se referme-t-elle sur elle-même ? Ionesco nous laisse le choix de la réponse.
Au Théâtre du Nouveau Monde
Du 8 mai au 2 juin 2018