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« La déesse des mouches à feu » de Geneviève Pettersen au Théâtre de Quat’Sous : vivre à tue-tête
Crédit: Bruno Guérin

Il est difficile de ne pas sourire béatement pendant presque tout le temps que dure La déesse des mouches à feu, l’adaptation théâtrale du roman de Geneviève Pettersen paru au Quartanier en 2014. Il y a quelque chose de magique à voir les onze interprètes adolescentes bondir sur la scène, sans véritable préambule, avec leur énergie contagieuse, et se présenter au public.
 
Le récit original met en scène Catherine, une jeune fille de Chicoutimi dont la crise d’adolescence prend des proportions mythiques, en 1996. Ceux qui n’ont pas connu la fougue de la jeunesse en même temps qu’elle pourront avoir une idée assez précise de ce qu’était vivre sa rébellion en région, tandis que ceux ayant vécu une expérience similaire ne pourront qu’être plongés de plein fouet dans leurs souvenirs.
 
Cette révolte emprunte les sentiers battus du désespoir, inévitable lorsque l’on grandit dans une petite ville : beuveries entre amies, consommation de PCP, chicanes familiales, mixtapes, expérimentations sexuelles, adulation de quelques icônes – dans ce cas précis, Kurt Cobain (qui vient, à l’époque où se déroule la pièce, de se suicider) et Mia Wallace, le personnage interprété par Mia Thurman dans Pulp Fiction, de Quentin Tarantino.

Crédit: Bruno Guérin

 
Là où la mise en scène imaginée par Alix Dufresne et Patrice Dubois frappe le plus fort, c’est dans le choix de confier l’interprétation de Catherine aux onze jeunes actrices. Chacune aura l’occasion de se saisir du personnage, de lui injecter un peu de sa personnalité, d’en proposer SA version. Et cette Catherine, qui prend beaucoup de place et qui parle fort, est un prototype absolu de jeune féministe, ne s’excusant pas de vivre à tue-tête, proclamant sans embarras son amour pour la drogue, devenant au fil de ses apprentissages la fille la plus bad-ass de son école.
 
Il n’y a d’ailleurs pas beaucoup de mains masculines qui ont contribué à cette aventure; outre Dubois, Pierre-Étienne Locas aux décors et Martin Sirois aux éclairages, tous les autres rôles de l’équipe sont tenus par des femmes. Des magnifiques costumes de Elen Ewing aux maquillages outrancièrement appropriés d’Amélie Bruneau-Longpré, en passant par la musique de Frannie Holder – qui propose de véritables bijoux de « covers » réadaptés des classiques de l’époque, de Nirvana à No Doubt, qu’on reconnaît ici par un riff, et là par la mélodie inoubliable.
 
La musique n’est d’ailleurs jamais très loin, que ça soit via un chœur auquel participent toutes les actrices ou une pièce hip-hop où chacune y va de quelques lignes. Les dialogues, oscillant sans cesse entre le trash et la poésie, proposent des phrases-chocs souvent très crues, et presque toujours hilarantes.
 
Cet hymne à l’adolescence n’est pas exempt de drames et de leçons de vie, qui nous sont présentées sans lourdeur et avec un aplomb et une sincérité qui font plaisir. La fluidité de l’ensemble, étant donné les thématiques assez sombres et le nombre d’interprètes, est épatante – un peu comme la joie de vivre brute et ardente que nous communiquent les jeunes femmes.
 
La plupart des représentations sont complètes, mais bonne nouvelle, une supplémentaire vient d’être annoncée pour le 31 mars.

 
La pièce est présentée au Théâtre de Quat’Sous jusqu’au 31 mars.

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