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Pop Montréal jour 3: est-ce un oiseau? Un avion? Non, c’est Les Savy Fav!

En allant voir cinq-six concerts par soir, on ne fait pas que des arrêts heureux. Si j’étais bien tombé jusqu’à maintenant, le concert de Danielson en première partie de Deerhoof, à la Tulipe, s’est avéré une erreur de parcours. Dirigé par le mystérieux Daniel Smith, alias Brother Danielson, le collectif folk-prof du New Jersey a certes commis quelques bons albums, mais sur scène, ses multiples excentricités (structures atypiques, uniformes militaires, sans oublier la voix nasillarde et haute perchée du leader) forment un tout assez indigeste, voire irritant. Passons…

Arrêt suivant: Passwords, au Rialto. Projet local impliquant notamment Emmanuel Éthier, musicien de scène pour Cœur de pirate, le combo indie-rock avait laissé filtrer en ligne quelques pièces fort prometteuses, ces derniers mois. On a trouvé sur scène une balance du même calibre. Le chanteur Thomas Lallier fait un peu d’excès de style par moments, mais tous les morceaux sont relevés de passages instrumentaux accrocheurs, étoffés, pleins de personnalité. On pense à Built to Spill, époque Keep it Like a Secret, avec un petit côté sixties en plus. Il s’agissait de l’un de ses premiers concerts, mais le groupe est déjà très serré. À revoir!

Direction Fédération ukrainienne, ensuite pour Timber Timbre. Toujours en formule trio, le groupe de Taylor Kirk a trouvé dans l’antre de la rue Hutchison le décor et l’acoustique parfaite pour son indie-folk bluesy, lugubre et atmosphérique. Les belles résonnances chaudes et boisées de l’endroit enveloppaient la voix unique de Kirk, les deux guitares et le violon de façon telle qu’on ne regrettait plus les arrangements plus fournis entendus sur disque, comme ça a déjà été le cas lors de prestations passées. Même que certaines pièces, comme «Demon Host» ou «Until the Night is Over», gagnaient en poigne. Il faut dire que le combo a resserré et épuré ses arrangements. Plus d’un pincement au cœur durant cette heure solennelle.

La deuxième moitié de la soirée s’est déroulée sous le signe du rock. Au Cabaret, les légendes punk locales Asexuals donnaient leur premier concert en formation originale depuis 25 ans. Non, je n’étais pas là, lors de leurs beaux jours, mais pour avoir été un adepte de l’autre groupe que John Kastner a dirigé après les Asexuals, les Doughboys, et ainsi avoir été témoin de ses égarements pop-rock, il faisait bon voir et entendre le musicien à nouveau jouer du punk. L’atmosphère était à la fête plus qu’à la nostalgie, le groupe était bien serré, en forme, et j’ai pu attraper quelques-uns de ses meilleurs morceaux («Ego Trip», «Contra Rebel»…) ainsi qu’une reprise punky amusante de «Pressure Drop» de Toots & the Maytals… Il y aurait donc une origine reggae derrière les dreads de John Kastner.

Au Divan orange, Hollerado a donné une prestation beaucoup trop courte, mais survoltée comme à l’habitude. Des serpentins et des confettis ont plu à plusieurs reprises sur les têtes des fans entassés. Quelques nouveaux morceaux ont été joués, mais le quatuor ontarien continue de se concentrer sur les pièces de Record in a bag, ce dont on ne saurait se plaindre. À la sortie, des pinceaux étaient distribués: c’était le temps de décorer la toute nouvelle camionnette du groupe, comme les fans l’avaient si bien fait avec la précédente. Avant de terminer le concert, le chanteur Menno Versteeg n’a donné qu’une seule directive aux fans: «pas de feuilles de mari!» Car certaines décorations peuvent compliquer les passages aux douanes…

À l’Espace Reunion, j’étais tenté de déserter pour aller entendre Duchess Says faire trembler les murs du studio Breakglass, quelques coins de rue plus haut… Puis, Les Savy Fav est monté sur scène. Dès les premières mesures, le chanteur Tim Harrington s’est jeté dans la foule. Il a chanté au beau milieu des fans, arpenté la salle, enroulant au passage humains et objets de son fil de micro… Il était dès lors évident que je n’y perdais pas au change en restant. Comme de fait, Harrington a continué ce genre de sparages une heure durant, sur fond d’indie-rock tranchant, mode Fugazi. Point d’accalmie, point de temps mort… Le public a plutôt bien rendu au groupe son énergie: à l’avant, ça «moshait», ça essayait de grimper aux poutres du plafond… Au rappel, Harrington a couronné une prestation déjà colorée en se revenant sur scène costumé en espèce de Big Bird postmoderne. Un chouette moment de rock. Le quintette du New Jersey a beau rouler depuis une quinzaine d’années, il semble être au sommet de sa forme.

Ce qui n’était pas mon cas, évidemment, après cette soirée bien chargée. On n’a pas besoin de compter des moutons, durant Pop Montréal!

 

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