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The Slew, Spank Rock et DJ Food au FIJM: la quête

Tandis que j’écoutais The Slew, Spank Rock et DJ Food souligner les vingt ans du label Ninja Tune, samedi au Métropolis, je ne pouvais m’empêcher d’avoir l’impression que tout un pan de la musique électronique, présentement, se cherche.

Pourtant, un tas de choses passionnantes se trament (notamment du côté de la scène californienne – on l’a dit et redit). Mais chez les vétérans comme Kid Koala, ou même chez des jeunots au millage déjà certain, comme Spank Rock, le surplace guette. Des propositions fraîches il y a quelques années ont déjà pris des rides. Les limites du langage se font sentir. On sent l’effort d’éviter le cul-de-sac, on salue l’adresse avec laquelle il est contourné de justesse, mais on ne danse quand même pas comme on a déjà dansé.

Après une brève introduction par Strictly Kev (alias DJ Food), le Philadelphien Spank Rock a ouvert le bal en enfilant les «Rick Rubin», «Backdoor Betty», «Bump» et autres «Put That Pussy on Me», ainsi que quelques nouvelles chansons dans les mêmes tons de hip-hop électroïde et de funk «Prince-esque». Des tubes toujours aussi engageants et colorés qu’il y a quatre ans, soit, mais qui misent sur une lascivité caricaturale qui a vraiment fait son temps. Plus tard, quand DJ Food (qui a conclu la soirée avec un second set plus dansant, après The Slew) a envoyé «Travailler» de TTC, je me suis dit que cette attitude pastiche et second degré avait tellement été servie et resservie que la démarche a aujourd’hui retrouvé une connotation presque ringarde.

Spank Rock demeure néanmoins un excellent showman, entouré d’un producteur (XXXchange) et d’un DJ (Ronnie Darko) de talent. Ce sont ces forces qui ont porté leur prestation. Le trio était d’autre part augmenté d’un batteur, ce qui ajoute du tonus à leur proposition. Mais Spank Rock et ses associés devront redoubler d’efforts pour se renouveler en prévision de leur prochain album, prévu pour 2011.

Quant à The Slew (en photo), il s’agit évidemment du projet «rock» de Kid Koala, au sein duquel jouent aussi le DJ américain Dynomite D, ainsi que le bassiste et le batteur australiens Chris Ross et Myles Heskett (tous deux anciennement du combo stoner-rock Wolfmother). N’ayant pas eu l’occasion de goûter la chose live, j’avais trouvé l’album 100%, paru fin 2009, plutôt quelconque. Les mélanges de rock, de hip-hop et d’électronique n’ont après tout rien de très neuf et les compositions du quatuor, sur disque, ont peu de relief.

Live, par contre, c’est autre chose. Question de texture et d’amplitude: tous ces samples de guitares ont beaucoup plus de couleur et de vie lorsqu’ils sont triturés en direct par les deux DJ. Aussi rock soit le projet, le son du vinyle et des aiguilles en fait partie intégrante. Sur disque, cette teinte ainsi que le charme qu’elle apporte s’évaporent, mais live on y goûte pleinement. N’oublions pas non plus le muscle considérable que représentent les deux Australiens: sa force est beaucoup plus perceptible live. Une heure trash à souhait qui aura passé comme une longue version postmoderne de «War Pigs» de Black Sabbath (clairement une influence du projet). L’opération se veut éphémère, mais il y aurait matière à continuer: The Slew rocke beaucoup plus que bien des «vrais» bands de rock.

Au final, une soirée agréable, dynamique, mais quand même assombrie par une constatation: le son Ninja Tune d’aujourd’hui n’a pas ce lustre nouveau et original qu’il avait il y a dix ans. Cela dit, il a beau se chercher, la quête n’en demeure pas moins généralement intéressante.