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François Sagat @ FNC: entrevue dans une chambre d’hôtel

Je rencontre François Sagat à sa chambre d’hôtel. Malgré le fait que nous soyons tous deux dans le même film, il s’agit de ma première rencontre avec l’homme.  Star du milieu XXX gay et nouvellement acteur pour Bruce LaBruce et Christophe Honoré,  il est à Montréal pour présenter le dernier film de Christophe, Homme au bain

Le film raconte la fin d’une histoire d’amour. Omar (Omar Ben Sellem) quitte Emmanuel (François Sagat) pour aller suivre une actrice, Chiara Mastroianni, qui présente Non ma fille, tu n’iras pas danser à New York. Il y fera la rencontre d’un Québécois (euh… moi), tandis qu’Emmanuel recherchera son ancien amoureux à travers le corps des autres.

Le film explore la perte de repères émotionnels que provoque la rupture amoureuse, et les tentatives de surmonter le vide laissé par l’être aimé. J’échange quelques mots avec François, il m’offre un truc à boire et s’aperçoit que le mini-bar de l’hôtel est vide. L’entrevue commence et on ne parle que d’Homme au bain. Il me mentionne qu’il n’est pas de passage dans la métropole pour faire la promotion de L.A. Zombie.
 


Qu’est-ce qui t’es venu en tête après avoir vu le film la première fois?

C’est de la merde (rire). Non, non.. Le problème c’est que quand tu regardes un film et que tu es dedans, tu commences par ne regarder que toi. C’est un peu égoïste. J’imagine que pour toi c’était pareil, tu as vu le film?

Deux, trois fois…
C’était mieux de le revoir la troisième fois pour moi en fait. J’étais plus objectif par rapport à l’ensemble du film, par rapport aux autres et à la manière de filmer. Ça m’a provoqué des sensations. C’est un objet dont on se souvient. Le film est volontairement déconstruit, car il avait été fait en court-métrage à la base. Les images de New York sont venues se greffer dessus d’une manière pas hasardeuse, mais entrecoupées à chaque fois. Je ne sais pas si le spectateur qui découvre le film pour la première fois se sent un peu perdu ou perd ses repères, je ne sais pas. Tu as entendu les critiques, toi?

 

J’ai vu qu’il y en avait beaucoup de négatives, beaucoup ont pris plaisir à le démolir injustement, je crois.
Les gens fidèles à Christophe Honoré ont été un petit peu déçu de ce projet là, parce que c’est un projet peut-être trop personnel. C’est un projet qui le tenait à coeur d’un point de vue de fantasme dans l’expérimentation sexuelle. Il a mis en scène quelque chose de plus orienté sexuellement et c’est ce qui peut avoir gêné les adorateurs de son oeuvre. C’est un projet complètement différent des précédents. Et un acteur porno, comme moi, qui est dans le milieu gay… je pense que les gens ont du se dire que c’était quelque chose de voyeuriste, de facile à faire, comme de la provocation et pour moi ça n’a rien à voir. 

 

Tu n’as pas été sous le choc, la première fois que tu t’es vu?
Je me suis trouvé assez juste dans le peu que je dis, mais je ne me considère pas comme un acteur. Je me considère encore comme une image qui a été utilisée avec une vision différente. La première fois que je me suis entendu parler dans le film, j’ai eu un peu peur. J’ai trouvé qu’il y avait quelque chose de réaliste, vu que moi, je suis tout le temps sur le contrôle… C’est en le revoyant que je suis arrivé à ne pas me déranger moi-même. J’arrive à me supporter.

 

Et travailler avec Christophe Honoré, c’était comment pour toi?
Je l’ai trouvé assez précis dans les indications. Je me plaçais de manière à ce que mon corps soit au mieux avec la lumière et tout, il voyait mes tics. J’avais la manie de tout le temps me mettre sous le meilleur angle et il m’a dit de ne surtout pas faire ça. Il m’a forcé à bouger. Sur l’expression, il m’a dit de ne pas trop en faire. 

 

Comment tu veux défendre le film devant tout ce qui a été dit de négatif?
Je ne veux pas attaquer les gens qui attaquent. Je trouve que c’est un sentiment légitime de ne pas se sentir séduit par le film. Du moment que c’est bien expliqué sans faire de discrimination sur la sexualité, comme certains l’ont fait. Je comprends qu’on ressorte du film avec un sentiment d’énervement, de foutage de gueule, comme si on avait l’impression que le réalisateur avait foutu n’importe quoi, mais chaque perception est différente. C’est comme une oeuvre d’art. On peut avoir un sentiment de dégoût, de rejet, mais par contre on s’en souvient. J’ai eu beaucoup de commentaires négatifs provenant du milieu homosexuel, qui trouvait que je n’avais pas ma place là-dedans, que l’association était un peu vulgaire et qu’Honoré avait fait un choix facile en me prenant. C’est les impressions que j’ai eues. Je n’ai pas fait ça pour plaire.

 

Et tu dis quoi aux gens qui n’ont pas encore vu le film?
De ne pas se forcer à le voir (rire). Non, mais sérieusement, je pense que c’est un film à voir, qui ne laisse pas indifférent.

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