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Le troubadour country Dany Placard brosse un vibrant portrait de famille avec son nouvel album

Comme bien d’autres auteurs-compositeurs folk, Dany Placard est un artiste de routine. «Moi, j’me réveille la nuitte. J’m'en vas dans’ cuisine pis j’écris. Ça va durer une demi-heure, pis quand je sens que mon idée est ben placée, ben claire, j’va enregistrer une mélodie à la voix, même pas d’guitare. Le lendemain, je r’check ça, pis si chus capable de continuer pis d’mettre ça en place, je risque de garder la toune», explique le Jeannois montréalais dans son accent bien chantant.

La seconde partie de l’équation, c’est la fameuse «shed à Placard», un cabanon situé derrière l’appartement que l’artiste occupe avec sa conjointe et ses deux enfants. C’est là qu’il a enregistré la plupart de ses albums, comme Rang de l’église (2005) et Raccourci (2008), de même que ceux qu’il a réalisés pour d’autres artistes, comme Chantal Archambault.

Vient néanmoins un temps où la routine atteint ses limites. Placard l’a d’abord rompue en 2010 en délaissant le folk avec Placard, un album à saveur plus rock, fait de chansons dédiées à des personnages féminins fictifs. Avec Démon vert, son petit nouveau qui sort cette semaine, il varie de plus belle les procédés. Il y renoue avec le folk et le country, mais il a troqué sa «shed» contre un studio en bonne et due forme, en plus de confier la réalisation à une oreille extérieure: le bien connu Pierre Girard (Malajube, Karkwa, Galaxie, etc.).

«Je voulais faire changement, pogner un genre de p’tit upgrade, souligne Dany. À un moment donné, quand tu travailles toujours tout seul avec ton propre équipement, tu finis par un peu virer en rond. J’avais l’goût de mettre ça dans ’es mains de quelqu’un d’autre, pis de juste faire d’la miouze. Au lieu de m’occuper de toutte ploguer, de toutte faire la prise de son, j’ai laissé Pierre aller. Moi, j’avais juste d’la musique à fére, pis j’ai trouvé ça ben tripant!»

Gros plans
Autre virage: après les récits entièrement fictifs de Placard, le troubadour y va de touchants hommages à ses proches – ses fils Robin et Jules, sur «Robin» (duh) et «Lucky Luke»; sa blonde Sarah sur «Sarah» (re-duh); un oncle gai imaginé en travelo sur «Matante Line» et… lui-même sur la pièce-titre. «J’étais dû pour parler de moi. Faut faire face à ses angoisses et à son propre personnage.» Il avait forcément déjà tâté du personnel avant, mais estime être allé plus loin cette fois. «J’pense qu’avant, c’était moins direct, moins cartes sur table. À l’âge où je suis rendu, au nombre de disques que j’ai sortis, j’ai p'us rien à perdre.»

Tout n’y est pas qu’amour. «Parc’qui m’fallait», la première pièce composée pour l’album, témoigne d’un cheminement artistique parsemé d’embûches et de frustrations. «C’était un peu pour expliquer aux gens qui connaissent pas le milieu – qui pensent que c’est tout l’temps rose, qu’on a tout l’temps du fun pis qu’on fait yinque se saouler la yeule –, que c’est pas juste ça. C’est tough en maudit, pareil», souligne l’artiste. «Tsé, mon album d’avant, c’était juste des tounes couplet-refrain-couplet-refrain-solo. Finalement, ça a pas marché pantoute. J’étais peut-être un peu amer de tout ça, faque j’ai écrit c’te toune-là. Mais en même temps, je suis vraiment content, parce qu’en faisant cet album-ci, j’ai pas pensé pantoute aux radios.»

L’harmonie domine toutefois Démon vert. À commencer du côté de ces splendides orchestrations fournies par Toots Macbeth (banjo, dobro), Michel-Olivier Gasse (basse), Guillaume Bourque (pedal steel) et Jean-François Mineau (batterie). «Moi, j’ai pas fonctionné différemment de d’habitude, note-t-il, mais tsé, y’a aussi la gang, les quatre musiciens qui jouent avec moi. Ça fait un bon bout qu’on joue ensemble. Toots m’a dit: ‘’Placard, là, les tounes que tu nous amènes, ça m’allume! Ça sort tout seul, c’que j’ai à jouer dessus!’’ J’pense que si ça sonne bien, c’est aussi parce que les boys étaient contents.» 

Dany Placard: lancement de Démon vert
28 août | Lion d’or (5 à 7)
1676, Ontario est
danyplacard.com