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Critique de l’adaptation théâtrale d’Orange Mécanique: une œuvre noire qu’on a peinte en beige
Crédit: Bien qu’elle soit composée d’une série de tableaux intéressants, la mise en scène de Véronique Marcotte souffre d’un rythme déficient. Au final, on ne sort ni troublé, ni enchanté de l’adaptation théâtrale d’Orange Mécanique.

En entrevue, Véronique Marcotte affirmait que l’adaptation théâtrale du film culte de Stanley Kubrick n’allait certainement pas inspirer de jeunes délinquants à commettre des crimes, comme ce fut le cas en 1971 à la sortie du film en Angleterre. La metteure en scène avait raison. Non seulement le public de 2013 a-t-il trop vu de représentations extrêmes de la violence pour s’offusquer de ce qu’elle a concocté, mais il a également eu droit à une proposition dont l’ampleur n’avait rien de comparable à celle des œuvres de Kubrick.

Basée sur le roman d’Anthony Burgess, la production théâtrale exulte un sentiment de grandiloquence étouffée pendant plus de 90 minutes. Lorsqu’Alex et ses drougs nous balancent des expressions poétiques dans un langage soutenu aux accents franchouillards, on a l’impression qu’ils sont trop propres pour la saleté de leurs actions. Durant la première partie de la pièce, le trio prend plaisir à battre un sans-abri, à saccager une maison et à violer madame sous les yeux horrifiés de monsieur, jusqu’à ce que le leader du groupe se fasse arrêter par la police, après avoir sèchement assassiné une inconnue.

Contrairement aux appréhensions de tous ceux qui avaient regardé le film ou de ceux qui n’avaient jamais été capables de se rendre jusqu’au bout, la version théâtrale d’Orange Mécanique n’a rien de traumatisant. Si notre tête comprend que les trois délinquants sont en train de commettre des atrocités, notre corps est pratiquement détaché des émotions que ces actes devraient provoquer. Les différents mouvements chorégraphiés (viol et batailles) sont joués beaucoup trop gros pour être crédibles et les spectateurs ont été trop souvent témoins de cruauté à la télévision, au cinéma et dans les vidéoclips depuis des années pour être horrifiés par ce qui se produit sous leurs yeux.


Tiré de la vidéo Orange Mécanique – Répétition devant les médias / 23 janvier 2013

Si la première partie du spectacle nous laissait quelque peu perplexes, la deuxième vient toutefois racheter bon nombre de maladresses. En faisant subir à Alex une thérapie financée par le gouvernement afin d’éradiquer la délinquance et les réflexes violents des prisonniers, Orange Mécanique regagne peu à peu notre intérêt. En déployant toute la puissance de son jeu, Maxime Le Flaguais nous offre un Alex charmeur et romantique, avant de plonger tête première dans les affres de la torture physique et psychologique. Roger La Rue se démarque lui aussi grâce à son interprétation sentie des rôles du curé et du policier. En écoutant les observations de l’homme de loi, le public est amené à se questionner sur l’origine du mal, la dérive de la jeunesse et la place occupée au quotidien par la violence dans notre société. 

Bien qu’elle soit composée d’une série de tableaux intéressants, la mise en scène de Véronique Marcotte souffre d’un rythme déficient. Au final, on ne sort ni troublé, ni enchanté de l’adaptation théâtrale d’Orange Mécanique. On a plutôt envie de se diriger vers le club vidéo pour louer le film…

 

Orange Mécanique
Du 13 au 16 février
Olympia | 1004, rue Ste-Catherine E. | orangemecanique.ca

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