Critique de la pièce «Lignedebus»: l’explosion d’un autobus montréalais, la surface de ses passagers
Samuel LarochelleTragédie théâtrale, chorégraphique et acrobatique présentée Aux Écuries, «Lignedebus» est une œuvre pleine de promesses, de grandes déchirures, de cultures qui s’entrechoquent, de solitudes qui se croisent, de surprises… et de superficialité.
Au coin des rues Chabot et Jean Talon, un théâtre vous ouvre ses portes afin que vous preniez place devant la carcasse d’un autobus. À son bord, les vestiges d’un drame qui a fait les manchettes et que tente d’expliquer un coroner, en s’adressant aux défunts qui se trouvaient dans le mauvais véhicule au mauvais moment.
La scénographie imaginée par le Théâtre I.N.K. est d’une réussite incontestable. La reproduction d’un immense autobus démontable est utilisée à sa pleine mesure: pour situer la nature des personnages et leurs enjeux, projeter des images vidéo du drame ou des images tournées et diffusées en direct, retranscrire les textos que s’échangent les personnages et servir de terrain de jeu aux acteurs-acrobates.
Crédit: Eugene Holtz
À divers moments clés de la pièce, les membres de la distribution reconstituent des scènes de leur passé ou de leur monde imaginaire en se balançant avec les poteaux, en surgissant des compartiments de rangement au plafond ou en interprétant un balai de fantasmes, sans jamais forcer la note.
Malheureusement, l’histoire qui nous est racontée n’arrive pas à la cheville de ce que nos yeux ont le bonheur de découvrir. Qu’il soit question de nos rapports quotidiens dans les transports en commun, de notre place dans la société, de notre quête d’amour, du multiculturalisme, des étiquettes que les gens nous donnent comme un mal nécessaire et de la justice déraisonnée que le public proclame sans être en possession des faits, jamais nous n’avons l’impression d’avoir droit à quelque chose de nouveau.
Le manque de profondeur du texte de Marilyn Perreault est flagrant, alors qu’elle nous a habitués à des bijoux d’originalité, de pertinence et de beauté, tels «Les Apatrides», «Roches, papier, couteau…» et «Britannicus Now». Certaines phrases sonnent creux, les fils du récit manquent de subtilité et on ne dépasse pratiquement jamais le déjà-vu.
Les ruptures de ton viennent également plomber différents moments du spectacle. Le réalisme minimaliste avec lequel le coroner s’adresse aux défunts détonne avec leur ton franchement plus enthousiaste, dans le drame comme dans l’amour.
N’empêche, la scénographie et la mise en scène de «Lignedebus» valent le détour à elles seules.
Lignedebus
Du 4 au 22 février | Aux Écuries