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Le Détesteur: «Sois pas fâché, j’peux te faire une pipe, si tu veux.»

J'ai rencontré cette fille sur MonClasseur (lol) backindadays. J'avais 21 ans. On a virtu-flirté supra-longtemps avant de finalement planifier une rencontre dans le monde réel. On a pris un café et poursuivi nos virtu-convos en face à face. Pas d'attente, rien, un café, une convo pis on se redonne des nouvelles après. Mais clairement, on se voulait, fak on s'est donné rendez-vous le week-end suivant. 

Elle venait passer la fin de semaine chez mes parents. La semaine qui avait pris l'apparence de l'éternité nous avait servi à expliquer à l'autre comment et à quel endroit (inusité ou non) on allait lui faire l'amour. C'est dire combien on ne pouvait plus attendre.

Samedi, enfin. Tout plein d'activités nous attendaient et servaient naturellement de prémisse à ce qu'on avait beaucoup trop convoité depuis au moins 7 jours: enlever tous nos vêtements. 

Malgré une supra-awesome journée, je la sentais légèrement déconnectée, par moment. C'est une fois rendus chez mes parents que j'ai compris. Elle s'est finalement décidée à m'admettre qu'elle était dans sa semaine. À la toute dernière minute, comme ça, juste avant qu'on s'apprête à le faire. Pis elle s'est mise à pleurer.

-Mais pourquoi tu pleures? C'est pas grave.
-Bin là! J'ai tout gâché. Ça fait une semaine qu'on se dit qu'on va le faire, pis là j'arrive chez toi pis à cause de moi, on peut rien faire. Tu dois me détester, en plus t'es pogné avec moi pour le week-end.
-Han? Bin non. Tu peux pas, tu peux pas, ç'arrive, voyons donc.
-Arrête de faire semblant, c'est sûr que t'es fâché, les gars peuvent pas attendre pis ils aiment pas les faux espoirs.
-N'importe quoi. 
-En tout cas, c'était comme ça avec mes ex pis la plupart des gars que j'ai déçus parce que j'pouvais ou voulais pas.
-Ok? Mais ils sont idiots. J'veux dire, on a passé du bon temps ensemble pis ça va se poursuivre demain. Le sexe peut attendre une autre semaine. Ou deux.
-Si tu veux, j'peux te faire une pipe.
-Évidemment que j'veux. Mais toi, es-tu dans l'mood pour ça?
-Honnêtement, pas vraiment.
-Bon, bin tu me feras pas de pipe.
-T'es sûr? Tu seras pas en crisse?
-Oui j'suis sûr.
-Mais j'comprends pas. M'semble que quand vous êtes horny, vous devez absolument le faire MAINTENANT. Sinon ça fait mal pis c'est pour ça que vous êtes fâchés.
-C'est pas vrai ça. 
-Ok, mais déteste-moi pas, j'vais me reprendre la semaine prochaine.
-Tu me dois rien. Ton corps peut pas, c'est comme ça. J'suis ni fâché, ni déçu et j'ai mal nulle part.
-Ok, merci de comprendre. 

Je repense souvent à cette soirée pis aujourd'hui j'me dis que, sans le savoir, j'étais à une question d'avoir du sexe sans consentement, sans plaisir réciproque, avec cette fille, et que, comme elle me l'a avoué, plusieurs gars ont profité de cette situation pour bénéficier d'une fellation, voire, d'une pénétration anale, en guise de pardon. 

Du sexe non-désiré, une corvée, une compensation, pour se faire pardonner de ne pas pouvoir en faire. C'est fucked up. Accepter d'aller de l'avant revient à dire que la femme est redevable à l'homme, qu'une fois qu'un consentement s'est fait connaître, il est quasi trop tard pour reculer et qu'il serait préférable de procéder malgré tout, sans quoi il pourrait y avoir des représailles.

Des histoires comme ça, j'en reçois plusieurs dans mon inbox. Homme comme femme qui se questionnent sur leur propre comportement et/ou celui d'un ancien partenaire. Et beaucoup trop souvent, il semble y avoir eu agression.

Une seule question pourrait éviter tout ça. Ne penser qu'à son plaisir personnel immédiat et jouer sur les incertitudes et incompréhensions du sexe opposé ne contribue qu'à augmenter les risques d'agression sexuelle et rend la tâche encore plus compliquée pour les victimes qui envisagent dénoncer, vu l'ambiguïté et le jugement des gens qui tendent à pencher du côté du présumé agresseur. 

Le sexe peut attendre. Il n'y a pas d'urgence, cessons de faire comme si. 

Je vous déteste.