Après avoir atteint de nouveaux sommets de splendeur en décembre dernier avec Toruk, une création inspirée du film Avatar dans laquelle les acrobaties étaient au service d’une histoire, le Cirque du Soleil est retourné à ses vieilles habitudes avec Luzia : un simili fil conducteur, un enchaînement de numéros plus ou moins spectaculaires et un ensemble suffisamment consensuel pour remplir le chapiteau du Vieux Port pendant trois mois.
À la seconde où l’on comprend que le Cirque se contente de clins d’œil à la culture mexicaine (sa faune, sa flore, ses insectes, certains traits culturels illustrés grossièrement), on essaie de masquer notre éternelle envie de se faire raconter une histoire en transposant notre attention sur les qualités acrobatiques des numéros.
Malheureusement, force est de constater que la première partie possède bien peu d’éléments pour nous décrocher la mâchoire, nous écarquiller les yeux ou nous émouvoir.
Plein de bonne foi, on salue l’idée d’installer sur un tapis roulant les circassiens qui sautent à travers les anneaux chinois. On ne peut tenir sous silence la formidable tension qu’installe Ugo Laffolay durant son numéro de cannes en équilibre toujours plus en hauteur, mais on serait menteur de dire qu’il était surprenant. Tout comme on peut témoigner de la savante réunion du trapèze et de la roue Cyr sous un jet d’eau, en précisant qu’on a vu leurs mouvements cent fois. À vrai dire, un numéro de danse avec ballon de « foot » s’avère le plus réussi de la première heure. On répète : UN NUMÉRO DE DANSE AVEC UN BALLON…
Mention spéciale aux costumes de cactus obèse, gringalet et fort membré, qui nous font oublier quelques instants les interventions peu divertissantes du clown de la soirée, Eric Fool Koller. Si quelqu’un sait où acheter pareil accoutrement d’ici à l’Halloween, on est preneur!
La soirée prend une tournure plus satisfaisante durant la deuxième partie. Rudolf Janecek présente un numéro de jonglerie avec une adresse et une vitesse d’exécution absolument renversantes! Benjamin Courtenay ne révolutionne pas l’art des sangles aériennes, mais insuffle grâce et sensualité à son numéro très athlétique. Le contorsionniste Aleksei Goloborodko semble quant à lui sorti d’une autre planète, tant sa flexibilité est inhumaine et ahurissante.
Du reste, on a droit à une section de balançoire russe très commune, un passage de mâts chinois ordinaire, une portion de plongée sous-marine suspendue souriante et de nouvelles interventions peu concluantes du clown de transition.
Plusieurs numéros peu mémorables qui sont toutefois sauvés, en partie, par la présence ponctuelle de la chanteuse Majo Cornejo, charismatique, dotée d’une magnifique voix chaude et vêtue d’une robe sur laquelle des fleurs s’ouvrent et se referment lorsque les notes s’envolent. Charmante idée.
Luzia possède juste assez de temps forts pour obtenir la note de passage, mais demeure trop prévisible pour mériter notre admiration béate. Surtout quand on sait que la TOHU mise sur certains spectacles aussi rassembleurs et parfois plus surprenants… pour le quart du prix.
« Luzia » est présentée dans le chapiteau du Vieux Port de Montréal jusqu’au 17 juillet 2016.